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Cours de philosophie

La science est-elle incompatible avec la religion?

4 Avr 2008 par Simone MANON

Goya. Scène d'Inquisition. Fondation de Zaragosse.

  L'incompatibilité  est le propre de ce qui ne peut coexister. Si la science et la religion sont incompatibles, cela signifie qu'elles ne peuvent s'accorder sur une question donnée et que si l'on adopte l'une, l'autre est nécessairement exclue. De fait les religions proposent des croyances, des dogmes alors que la science se définit comme une connaissance rationnelle, méthodique et objective d'un domaine d'objets. L'une requiert la foi, l'autre ne reconnaît que la validité de la preuve mathématique ou empirique. L'une se distingue par le caractère foisonnant des croyances, chaque religion ayant son corps de dogmes et souvent des plus contradictoires, l'autre élabore des propositions susceptibles de faire l'accord de « tous les travailleurs de la preuve » c'est-à-dire de tous les membres de la cité scientifique, quelles que soient leurs appartenances nationales ou religieuses.

  A première vue, il semble donc bien que les discours religieux et scientifique ne fassent pas bon ménage mais peut-on parler d'incompatibilité ? La science peut-elle dénier toute légitimité à la religion et réciproquement la religion peut-elle disqualifier la validité scientifique ? Freud s'est efforcé d'instruire le procès de la religion et il a nourri sans trop d'illusions le rêve d'un monde à venir où l'éducation rationnelle supplanterait l'éducation religieuse et affranchirait l'homme de sa séculaire névrose infantile en le faisant accéder à sa majorité spirituelle et morale. Pour Freud et de nombreux savants, il y a une incompatibilité de droit entre la science et la religion.

  Or n'y a-t-il pas de grands savants qui sont en même temps des hommes de foi ? Comment comprendre que cette incompatibilité soit démentie par les faits ? S'agit-il de dénoncer l'incohérence de ceux en qui la religion et la science cohabitent ou bien portent-elles sur des réalités si différentes et ont-elles des enjeux si hétérogènes qu'à défaut de pouvoir en concilier les réquisits, il convient d'admettre qu'elles ont chacune leur place dans l'humaine condition ?

I)                   Incompatibilité de la science et de la religion.

  Les conflits opposant dans l'histoire, la science à l'institution religieuse ne laissent guère de doute sur la réponse à apporter à notre question. Lorsque l'Eglise fait brûler Giordano Bruno en 1600 pour avoir affirmé l'infinité de l'univers, lorsqu'elle condamne Galilée à renoncer à soutenir l'option copernicienne en matière de système planétaire, il est clair que les énoncés des deux domaines sont incompatibles car à l'opposé de la science naissante, les autorités religieuses s'en tiennent au principe d'un monde fini et à l'option ptolémaïque. De deux affirmations contradictoires, il est impossible qu'elles soient vraies toutes les deux. Elles peuvent être fausses l'une et l'autre, mais s'il y en a une de vraie, l'autre est fausse.

   Ces faits historiques montrent qu'il y a bien une rivalité de la science et de la religion en ce qui concerne le système de représentations que l'une et l'autre élaborent du réel en général. Aujourd'hui encore les partisans du créationnisme, option religieuse, dénient le droit de la science à soutenir l'hypothèse évolutionniste.

   Or, qui de l'une ou de l'autre a raison ? Impossible de ne pas se le demander car on attend d'un discours qu'il obéisse à une norme de vérité. Parce qu'il est esprit l'homme se pose des questions, il a besoin de s'expliquer le monde dans lequel il vit ou sa propre existence. D'où venons-nous ? Qui sommes-nous ? Où allons-nous ? Il veut savoir et soumet la totalité du réel à l'interrogation. D'où les paroles, les grands récits par lesquels il médiatise son rapport au réel afin de rendre intelligible son expérience. Ces récits proposent des «  conceptions de l'univers  » c'est-à-dire des constructions intellectuelles ayant un caractère systématique et unifié. Mais parce qu'il est esprit encore, l'homme se soucie de la validité théorique de ces systèmes apportant des réponses à ses questions.

    La religion et la science proposant de tels systèmes, il s'agit de savoir si l'une et l'autre ont des droits égaux à la vérité ou au contraire s'il faut dire avec Freud qu'une telle prétention est «  le   propre d'une représentation antiscientifique de la réalité  ».

  «  La vérité, écrit-il, ne peut pas être tolérante, elle ne doit admettre ni compromis, ni restrictions. La science considère comme siens tous les domaines où peut s'exercer l'activité humaine et devient inexorablement critique dès qu'une puissance tente d'en aliéner une partie ». Nouvelles conférences sur la psychanalyse .  

  Qu'est-ce donc qui distingue le discours religieux et le discours scientifique, étant entendu que leur point commun est de produire de l'intelligibilité ?

  Dans les religions, le discours remplissant cette fonction est un mythe. Toute religion est pourvoyeuse de récits mythiques. Un mythe est toujours un récit des origines. Il raconte comment, grâce à l'exploit d'être surnaturels une réalité a vu le jour. «  La Genèse » dans la Bible raconte le processus de la Création de l'univers ; Le Coran ne propose pas un récit suivi de la Création du monde mais on retrouve les mêmes affirmations que dans la Bible. Allah crée par sa Parole comme le Dieu de Moïse (XVI, 40) il crée le ciel et la terre en six jours (VII, 54) il crée Adam le premier homme et Jésus (III, 59) etc. De même les mythes grecs décrivent le processus de la mise en forme du cosmos à partir du chaos.

  Le judéo-christianisme, l'islam, la religion grecque prétendent bien rendre raison du réel. Mais il faut avouer que depuis que la science s'est emparée de ces questions, elle est invariablement sortie victorieuse sur le plan strictement théorique du conflit l'ayant opposée historiquement à la religion.

  Alors d'où vient la supériorité théorique de la science ?

  On peut répondre sans prendre le risque de se tromper que sa supériorité découle de la fécondité et de la fiabilité de sa méthode dans la conquête des savoirs.

  La science est une connaissance s'élaborant à partir de deux fondements  :

  - la raison c'est-à-dire la faculté permettant d'établir des rapports, d'inventer des concepts, de développer des raisonnements.

  -l'expérience c'est-à-dire l'observation des faits et l'expérimentation.

  Connaître scientifiquement consiste à  construire un savoir positif d'un objet donné dans l'expérience.

  Il s'agit  au moyen de l'observation et du raisonnement basé sur celle-ci de découvrir les faits, de les relier les uns aux autres par des lois, puis à un second niveau d'abstraction de systématiser les lois dans des théories .

  Les lois et les théories sont d'abord posées comme des hypothèses de travail, non comme des vérités. Elles ne seront validées scientifiquement que si elles résistent aux tests destinés à en contrôler la vérité. Mais comme une loi ou une théorie sont des énoncés généraux et qu'on ne peut les tester que sur des cas particuliers, il est impossible de conclure à la vérité absolue d'une hypothèse. Il n'y a pas en science de vérité éternelle et absolue. Les vérités scientifiques sont des vérités approchées ; elles gardent un caractère provisoire s'attestant dans la formule consacrée « dans l'état actuel de nos connaissances, nous pensons que... »

  De nouvelles découvertes amènent ainsi à remanier les théories scientifiques et révèle que le savoir scientifique se conquiert progressivement dans un effort mobilisant des générations et autorisant à parler de progrès. On a plus de science en physique en 2008 qu'en 1700 et si les hommes ne relâchent pas leurs efforts, moins qu'en 3000.

   La description de la méthode scientifique met en évidence la supériorité intellectuelle du discours scientifique sur le récit mythique.

   La vérité du discours mythique n'est vérifiable ni par une procédure expérimentale ni par une démonstration . Elle s'impose par voie d'autorité . Ce qui la fonde est une révélation ou le prestige de ceux qui dans la cité sont vécus comme ayant la compréhension des choses sacrées. Prophètes, chamanes, sorciers, prêtres, imams etc. ces hommes sont considérés comme supérieurs à ceux qui ne sont pas dans le secret des dieux. Leur parole ne se discute donc pas. La vérité mythique a un caractère dogmatique exigeant la foi.  « Tout peut être changé sauf le Coran » dit un proverbe somali.

  Elle a l'arbitraire de ce qui prétend échapper à l'épreuve de la preuve empirique ou rationnelle .

   On comprend dans ces conditions sa faiblesse. Que les hommes osent se servir de leur entendement, que les données de l'observation démentent les dogmes et ceux-ci doivent nécessairement apparaître pour ce qu'ils sont : des énoncés sans valeur théorique.

  Bertrand Russell souligne que « le conflit entre la théologie et la science a été en même temps  un conflit entre l'autorité et l'observation  ».

  Le géocentrisme ne résiste pas longtemps aux observations de Galilée ; la Création du monde aux alentours de 4004 av. J-C. selon des estimations tirées de l'âge des Patriarches ou le fixisme ne résistent pas longtemps aux observations géologiques ou biologiques.

  «La nouvelle méthode obtint de tels succès, écrit Russell, tant pratiques que théoriques que la théologie fut peu à peu forcée de s'adapter à la science. Les textes bibliques gênants furent interprétés d'une manière allégorique ou figurative ...On en vint peu à peu à reconnaître que la vie religieuse ne dépend pas de prises de position sur des questions de fait, comme par exemple l'existence historique d'Adam et d'Eve » Science et Religion 1962.

   Au terme de cette comparaison on peut donc conclure que la religion ne peut pas rivaliser avec la science sur le plan théorique. Elle maintient l'homme dans une minorité intellectuelle indigne de sa vocation de sujet rationnel ; elle propose une conception du monde qui est, dans le meilleur des cas, une poétique. Mais un poème, aussi émouvant soit-il n'a aucune pertinence théorique. Seule la science est savoir et nul autre discours ne peut revendiquer cette dignité. Là où le savoir est impossible il faut se contenter de croire et, quelle que soit la force de la conviction intime, une croyance n'a aucun titre à la vérité. Seule la science peut se prévaloir de l'idée de vérité, non point parce qu'elle l'aurait trouvée mais parce qu'elle fait de sa découverte un programme et parce qu'elle témoigne par ses succès que les deux seules voies d'accès à la vérité sont la raison et l'expérience.

  Faut-il alors conclure à l'incompatibilité de la science et de la religion tant du côté de la représentation du monde que du côté du sujet qui construit ou adhère à cette représentation ?

  - Du côté de la représentation  : La science se représente le réel comme une réalité matérielle unifiée par la nécessité et l'universalité de ses lois. Les lois sont des rapports nécessaires et constants entre les phénomènes de telle sorte que les uns étant donnés, l'apparition des autres peut être prévue. La causalité immanente à l'univers est conçue comme une causalité aveugle. Exit l'idée d'une volonté conduisant les événements à des fins. La science sonne le glas de la croyance à un ordre providentiel.

  La religion, à l'opposé, dévoile le réel comme la Parole de Dieu. Tout est signe de sa puissance et de sa souveraineté. Il peut intervenir dans le monde par des miracles, il en est le Créateur dans les religions révélées ou l'ordonnateur dans la mythologie grecque. Il enchante le réel d'une présence invitant à la louange mais parfois aussi à la crainte. La majesté divine se décline selon les textes comme bienveillance ou colère. Il dévaste la terre dans le déluge, mais il fait briller aussi le soleil.

  -Du côté du sujet de la représentation  : Le savant construit le savoir en qualité de sujet rationnel ne reconnaissant pas d'autre autorité que la raison en matière de vérité. La conquête de l'objectivité scientifique requiert la difficile ascèse de l'imaginaire tenace d'un sujet sensible enclin à projeter sur le monde ses espérances et ses rêveries. L'émotion  poétique est impitoyablement laissée à la porte du laboratoire car « Les axes de la science et de la poésie sont inverses » (Bachelard).

  Le croyant, à l'inverse,  va au réel à travers ses affects. La crainte et l'espoir sont au principe de l'imaginaire religieux et celui-ci exige du croyant le renoncement à l'autonomie rationnelle afin de s'en remettre à une parole à laquelle il fait confiance.

  D'un côté comme de l'autre, l'antinomie semble radicale.

  Pourtant l'expérience montre qu'on peut être un savant et un homme de foi.   Comment donc cela est-il possible ?

II)                Tentative de conciliation de la science et de la religion.

1)      Premier argument.

  On peut souligner qu'elles témoignent l'une et l'autre d'un souci d'intelligibilité et que la religion achève une quête que le savant est contraint de limiter. Il décrit l'enchaînement des causes et des effets mais il est impuissant à dire la cause première. La religion la formule sous le nom de Dieu. Elle traduit ainsi l'exigence de la raison à interroger en vue de l' inconditionné , du principe qui explique tout et s'explique lui-même. Platon l'appelle dans l'allégorie de la caverne le principe anhypothétique, « ce qui est au-delà de l'être en dignité et en puissance ».

  Loin d'être incompatible avec la science, la religion lui serait paradoxalement nécessaire pour fonder la possibilité de son objet (pour qu'il y ait une machine, il faut un mécanicien. Cf. Descartes. Voltaire) et de la vérité de ses énoncés (thème cartésien du Dieu vérace).

  Argument séduisant dont il est possible de donner de multiples variantes, par exemple celle qui autrefois se déclinait sous le nom de preuve cosmo-théologique de l'existence de Dieu . L'univers est trop bien ordonné, allègue-t-on encore, pour ne pas avoir une prodigieuse intelligence à son principe. La splendeur de l'ordre cosmique, sa complexité, son harmonie ne peuvent pas être l'effet du hasard.

   Sous les apparences de la rationalité ce raisonnement est néanmoins problématique à plus d'un titre. D'abord parce que « le Dieu d'Abraham, d'Isaac et de Jacob » n'est pas « le Dieu des philosophes et des savants » (Pascal). Celui-ci n'est pas un simple principe explicatif, c'est une Personne avec laquelle le croyant noue une relation d'amour.

  Ensuite parce qu'en prétendant remonter à une cause première, l'esprit est victime de ce que Kant appelle « une illusion transcendantale ». Il prend un principe subjectif de l'esprit (l'idée de cause) pour une réalité objective (une cause première : Dieu). Or la causalité est une catégorie de l'esprit destinée, dans son usage légitime, à s'appliquer aux données de l'expérience afin de les lier dans un ordre intelligible. Dés que l'esprit s'émancipe de ce cadre il fonctionne à vide. Kant estime par son analyse « avoir ruiné tous les desseins ambitieux d'une raison qui s'égare au-delà des limites de l'expérience » Critique de la Raison Pure.

  Cette première tentative de conciliation n'est donc pas convaincante.

2)      Deuxième argument

  Les arguments les plus sérieux viennent plutôt du côté de ceux qui demandent de distinguer des ordres de préoccupations hétérogènes.

  Par exemple dans sa Lettre à Castelli de 1613, Galilée affirme que « L'autorité des lettres sacrées n'eut pas d'autre intention que d'enseigner aux hommes les articles et les propositions nécessaires à leur salut et dépassant la raison humaine ». Et il poursuit en précisant que la raison a pour tâche légitime la connaissance scientifique de la Nature : elle s'efforce de déceler sous les apparences sensibles les lois qui règlent les mouvements de la matière.

  Galilée souligne ici que les enjeux des deux discours sont de nature différente. La science veut dévoiler les lois de la matière, la religion assurer le salut de l'homme.

  La notion de salut indique que le discours religieux obéit à une autre requête que celle du savoir rationnel. Il engage l'homme comme existant c'est-à-dire comme être pour la mort, infiniment intéressé à trouver un sens à son existence, à répondre à ses interrogations têtues sur sa destinée et à combler l'exigence d'une justification lui permettant de tenir en respect le sentiment de l'absurde si dévastateur souvent. Pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien ? La mort comme simple événement biologique est-elle la vérité dernière de la vie et celle-ci est-elle pure contingence, simple hasard biologique ? L'espérance d'un monde sensé et moralement justifié, celle d'un au-delà où la vertu et le bonheur seront réconciliés sont-elles condamnées à ne rencontrer que le silence d'un réel étranger aux aspirations humaines ? Avoir besoin d'être sauvé signifie que sans un message propre à susciter la confiance l'homme se sent déchu, misérable, condamné à une existence dénuée de sens.

   Ces préoccupations sont si essentielles dans une vie d'homme qu'on peut comprendre le succès d'une Parole les prenant au sérieux. La croyance religieuse tire sa force de ce qui constitue la faiblesse de la science. Elle a le mérite d'assumer la question du sens et de la valeur que l'autre s'interdit de poser par parti pris méthodologique. Or aussi grande soit la science du savant, elle demeure trop désespérément muette sur ses interrogations métaphysiques et morales. C'est une chose de dévoiler les mécanismes de production des phénomènes, c'en est une autre de donner un sens à sa vie, autrement plus importante.

  Il s'ensuit qu'il est possible pour un même homme de participer à l'élaboration d'un savoir objectif des phénomènes empiriques en dehors de toute allégeance aux dogmes religieux et de faire confiance, par ailleurs, à une Parole permettant de se tenir debout dans l'espérance d'une signification ultime et d'une finalité morale de sa condition.

   Certes objectera-t-on, la science et la religion n'ont pas même vocation, elles satisfont des exigences hétérogènes et au fond ne sont pas en concurrence puisqu'elles portent sur des réalités différentes et mettent en jeu des aspirations différentes de l'esprit humain. L'une poursuit un idéal de connaissance de l'ordre empirique , l'autre un idéal moral renvoyant  à un ordre métaphysique .

   Cette nouvelle tentative de conciliation n'est pourtant pas entièrement convaincante car les discours en jeu proposent bien des représentations du réel et on ne voit pas comment peuvent être compatibles l'idée d'un monde obéissant à une causalité aveugle et celle d'un monde finalisé, créé par Dieu. On ne voit pas non plus comment, en dehors d'une certaine forme de schizophrénie, peuvent cohabiter dans un même homme la rigoureuse exigence rationnelle d'un logos libéré des requêtes affectives et prompt à dénoncer le caractère illusoire de tout discours ordonné à la satisfaction de désirs (comme le fait Freud, par exemple, à propos du discours religieux) et la confiance dans une Parole dont la mission est précisément de satisfaire des désirs.

  L' hétérogénéité devient ici antinomie et de nouveau on ne peut éluder la question de l'incompatibilité des deux ordres.

3)      Troisième argument.

  D'où la tentation pour donner ses droits à la religion de pointer les insuffisances de la science dans sa prétention à la vérité. Car s'interdire de poser la question du sens pour élaborer des savoirs objectifs est une chose, prétendre qu'il n'y a pas de sens en est une autre. Il faudrait montrer que cette proposition est une proposition objective or une telle démonstration est impossible. Elle suppose ce qui est à démontrer, à savoir qu'il n'y a de connaissance objective qu'à cette condition. L'objectivité scientifique exige de refuser une pertinence scientifique à la question du sens et de la valeur, mais il s'agit déjà d'une signification et d'une valeur auxquelles il est possible sans   contradiction d'en opposer une autre. « L'éthique de la connaissance » comme l'appelle Jacques Monod, ne peut pas se fonder, elle n'est qu'un postulat . Dès lors, il est permis d'en avoir d'autres.

   Voilà pourquoi, il n'y a jamais eu de meilleure justification du discours religieux que celle qui consiste à disqualifier la science, en soulignant l'impuissance de la raison humaine à parvenir par ses seules forces à la vérité. L'auteur de référence est ici Pascal.

  Grand mathématicien, grand physicien, Pascal s'est employé à humilier la raison humaine dans sa prétention au savoir. A « l'ordre de l'esprit » il oppose « l'ordre de la charité». A la sagesse « qui n'est nulle sinon de Dieu », il oppose la misérable science humaine en pointant l'incommensurabilité des ordres et la distance infinie qui les sépare.

  De fait qu'importe de savoir comment se produisent les phénomènes, si on est incapable de comprendre pourquoi . Qu'importe de savoir enchaîner correctement les propositions si on est incapable de poser les premiers principes et les fins. Qu'importe de connaître les lois physiques si on est incompétent dans les questions métaphysiques et morales.

  La raison est disqualifiée dans sa prétention à revendiquer un magistère en matière de vérité. Au contraire, elle devrait faire preuve de modestie  car sans le secours du « cœur » qui lui donne ses premiers principes, elle ne pourrait même pas produire le moindre raisonnement.

  Le constat pascalien est ici d'une grande pertinence. Il est bien vrai que la raison humaine est impuissante à démontrer toutes ses propositions. Elle a besoin d'axiomes ou de postulats pour s'exercer. Et puisque ses majestueux édifices sont des géants aux pieds d'argile, la vérité dont elle se prévaut n'est qu' hypothétique et provisoire. La science n'a aucune certitude. Alors au nom de quoi  peut-elle disqualifier une autre voie d'accès à la vérité ? « La superbe » dont elle se prévaut doit être rabattue. Ce qui est absurde aux yeux de la raison n'est pas absurde en soi, car la raison n'est pas autorisée, en raison, à faire de la raison le seul critère de vérité. Elle le croit, mais croire n'est pas savoir . Croire consiste à adhérer à un contenu de pensée sans raison suffisante. Une croyance a ceci de caractéristique que suffisante subjectivement, elle est insuffisante objectivement.

  Il s'ensuit que ce que la raison reproche à la croyance religieuse vaut aussi pour les savoirs qu'elle construit. En dernière analyse, il s'agit toujours d'avoir foi, de croire. Or, affirme Pascal, si la raison a besoin de la foi pour s'exercer, la foi, elle, se passe bien de la raison car avec le secours de la grâce, l'homme a une voie d'accès à la vérité autrement plus sûre que celle de la raison.

  « La foi est différente de la preuve : l'une est humaine, l'autre est un don de Dieu » Pensées . B.248.

  « C'est le cœur qui sent Dieu et non la raison. Voilà ce que c'est que la foi : Dieu sensible au cœur non à la raison ». B. 278.

  Les vérités théologiques sont inaccessibles à la raison humaine, c'est certain,  mais ce n'est pas un argument contre les vérités théologiques, c'en est seulement un contre l'autorité de la raison en matière de vérité. On connaît la formule consacrée : « Il n'est pas venu pour les philosophes et les savants ». La lumière vient de plus haut que la raison mais il faut être humble pour la recevoir. Car Dieu vient au secours de l'homme. Par la Révélation et l'Incarnation du Christ, il éclaire son cœur. Le cœur comme simple faculté naturelle ne peut saisir Dieu mais Dieu peut se rendre sensible au cœur. Il   n'y a donc que les Ecritures et le Christ qui puissent faire autorité en matière religieuse.

  D'où l'outrecuidance d'une raison revendiquant le droit d'en juger. Vouloir soumettre la Parole biblique, Parole sacrée, ou la personne du Christ à l'examen de la raison est une perversion,   une superbe diabolique . Il n'appartient pas à la raison et à la créature marquée par la finitude et le péché originel de comprendre ce qui la dépasse infiniment. Et c'est précisément parce qu'il y a de   l'incompréhensible pour la raison qu'il n'y a de salut que dans la foi .

  Avoir foi consiste, avec humilité, à se fier à, à avoir confiance en, à adhérer sans preuve. « Credo quia absurdum est » proclame Tertullien à propos de la Résurrection du Christ. J'y crois parce que ce qui est absurde selon la raison est vrai selon la confiance en la prédication christique. N'avait-il pas dit : « Si vous croyez en moi, vous ne mourrez jamais » ?

  Cf. St Paul. Première Epître aux Corinthiens. 18.25. « Le langage que parle la croix est une folie pour ceux qui vont à leur perte, tandis que pour ceux qui sont sauvés, pour nous c'est une puissance de Dieu. Il est écrit : « Je détruirai la sagesse des sages et j'anéantirai l'intelligence des intelligents » (Isaïe. 29,14). Où est le sage ? Où est l'érudit ? Où est le chercheur des réalités de ce monde ? Dieu n'a-t-il pas convaincu de folie la sagesse du monde ? (...) C'est bien d'une sagesse que nous parlons (...) mais non d'une sagesse du monde (...) Ce dont nous parlons, c'est d'une sagesse qui vient de Dieu, mystérieuse, demeurée cachée, celle que dès avant les siècles, Dieu a prédestinée pour notre gloire, celle qu'aucun des princes de ce monde n'a connue. S'ils l'avaient connue en effet, ils n'auraient pas crucifié le Seigneur de gloire ».

III)             Le désaccord de fond de la science et de la religion.

    Au fond quel que soit le domaine considéré, toute la difficulté vient de l'impuissance à   prouver d'une manière convaincante. « Nous avons une impuissance de prouver invincible à tout le dogmatisme » écrit avec justesse Pascal, et cela vaut aussi bien pour la science que pour la religion.

   Les religions révélées prétendent que la foi en Dieu se fonde sur la révélation de Dieu aux hommes mais il s'agit d'une pétition de principe car la justification de la foi s'effectue à l'aide de ce qui est précisément à prouver, à savoir l'existence de Dieu. La science échappe à la pétition de principe en reconnaissant qu'elle est fondée sur un postulat. Elle est plus rigoureuse logiquement, elle n'en est pas plus certaine pour autant.

  Il s'ensuit que le dogmatisme doit être exclu de part et d'autre.

   Mais il est vain de faire croire que du point de vue de l'une et de l'autre la compatibilité soit possible en toute cohérence .

  Ce n'est pas parce que la science reconnaît son incompétence sur certaines questions qu'elle ne soupçonne pas les discours religieux les prenant en charge, d'être trop ordonnés à la satisfaction des désirs pour être autre chose que des illusions.

  Ce n'est pas parce que la religion reconnaît la compétence de la science en matière de connaissance empirique, qu'elle accepte le principe des sciences, à savoir qu'il n'y a d'autorité que de la raison. La lumière surnaturelle lui paraît supérieure à la lumière naturelle et elle substitue au principe de l'autonomie rationnelle, celui de la nécessaire subordination de l'esprit humain à la transcendance divine.

  En dernière analyse il faut avouer qu'il  y a un désaccord de fond entre l'une et l'autre.

   Léo Strauss (1899.1973)  me semble  formuler les termes de ce désaccord avec fermeté. Il suffit de remplacer le mot philosophie par le mot science et l'essentiel est dit :

  « On ne peut esquiver le dilemme par un essai de conciliation ou de synthèse. Car toutes deux, la philosophie et les Ecritures, proclament qu'une seule chose est nécessaire : une vie de libre recherche pour l'une, une vie d'obéissance et d'amour pour l'autre ; or l'une est à l'opposé de l'autre. Dans tout essai de conciliation, dans toute synthèse, si remarquable soit-elle, l'un des deux éléments est sacrifié, subtilement peut-être mais à coup sûr (...) Si nous regardons de haut la lutte séculaire entre philosophie et théologie, nous ne pouvons guère manquer de penser qu'aucune n'a jamais totalement réussi à réfuter l'autre. Tous les arguments en faveur de la révélation n'ont de poids, semble-t-il, que si l'on présuppose la croyance en la révélation ; tous les arguments contre que si l'on admet l'incroyance au départ. Cet état de choses n'est que tout naturel. La révélation est si incertaine aux yeux de la seule raison qu'elle est toujours incapable de forcer son adhésion, et d'ailleurs l'homme est construit de telle façon qu'il peut trouver son bonheur, son accomplissement dans la libre investigation et dans la discussion de l'énigme de l'existence. Mais, d'un autre côté, il s'évertue si vivement à en chercher la clé et la connaissance humaine est toujours si limitée qu'il ne peut s'empêcher de ressentir le besoin d'une illumination divine, ni réfuter la possibilité de la révélation ». Droit naturel et Histoire.

  Conclusion  :

  Il y a manifestement une compatibilité de fait entre la science et la religion puisqu'on peut à la fois être un savant et un croyant. Preuve empirique que les requêtes humaines sont multiples et que la science et la religion remplissent des fonctions, certes différentes, mais aussi essentielles l'une que l'autre dans l'humaine condition.

  Reste qu'il n'est pas sûr que la conciliation que certains préconisent avec une certaine complaisance soit absolument cohérente. Car lorsqu'on cherche les arguments l'autorisant, on s'aperçoit que de part et d'autre les concessions requises seraient des désaveux s'il fallait les assumer jusqu'au bout.

  Aussi, me semble-t-il, que la rigueur est du côté de ceux qui, partisans du primat de l'une ou de l'autre, ne prétendent jamais les réconcilier . Freud et Pascal sont de ceux-là.

   Dans L'Avenir d'une illusion  Freud recense les entorses au principe de rationalité impliquées dans la croyance religieuse, du subterfuge du «  comme si  » (Kant fait en effet de la métaphysique, la discipline du « comme si », seule condition, permettant à ses yeux, de limiter le savoir pour laisser une place à la croyance) à la justification de l'absurde , manière Tertullien.

  Réciproquement un Pascal proclame l'incommensurabilté des ordres et au nom de la supériorité de l'ordre de la foi affirme de la science (ou de la philosophie) qu'elle "ne vaut pas une heure de peine".

  Il est donc permis de conclure à l'incompatibilité de droit de la science et de la religion.

Marqueurs: croyance , dogme , fait scientifique , foi , hypothèse , mythe , raison , religion , révélation , science , vérité

Posté dans Chapitre X - La religion. , Dissertations

76 Réponses à “La science est-elle incompatible avec la religion?”

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Bonjour Simone, et merçi a vous pour cet article que je trouve brillant, ainsi que votre réponse, précédente. Toutefois, est-il moral de se complaire dans l’ignorance? vous répondez, non, alors que moi j’aurais répondu, oui, …si c’est pour un confort intellectuel, comme les croyants aux religions. C’est moral pour eux, et ça leur fait du bien. La science est-elle compatible avec la religion? Eh bien, tout dépends de la religion. Il en existe en tout cas au moins une qui fait de la science, sa religion, et je vous laisse deviner laquelle.

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Bonjour Il me semble que vous faîtes bon marché des vertus de la lucidité. En ce sens, il est peut-être utile de méditer Descartes. Voyez le texte et son commentaire dans https://www.philolog.fr/bonheur-et-lucidite/ Bien à vous.

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Très belle réflexion, complète et méthodiquement argumenté, franchement c’est du beau boulot sans pour autant constituer une réflexion interminable.

J’ai tenté le même exercice si ça vous intéresse, bon moi y’a des blagues mais vous êtes plus rigoureuse je trouve 😉 https://www.youtube.com/watch?v=oQCLHZ1Io4A

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Je partage en grande partie votre point de vue sur la(les)) science(s) et la(es) religion(s) mais je voudrais faire deux remarques. Vous écrivez « Le géocentrisme ne résiste pas longtemps aux observations de Galilée ». Cette affirmation laisse penser que Galilée avait une ou des preuves « cruciales » en faveur de l’héliocentrisme. Cette affirmation est fausse et ce n’est pas une opinion personnelle. Si toutes les observations faites par Galilée n’étaient pas compatibles avec le système de Ptolémée ( je pense aux phases de Vénus) elles l’étaient par rapport au système de Tycho-Brahé ( système géo-héliocentriste). Il a fallu attendre J Bradley pour avoir une preuve difficilement réfutable de l’héliocentrique ,avec la mesure de la parallaxe des étoiles fixes. D’ailleurs Copernic et Galilée avaient, semble-t-il, une idée de la force d’une telle preuve mais, avec les instruments dont ils disposaient cela n’était pas possible d’y avoir accès .Cela ne remettras en cause les immenses mérites de Galilée dans la naissance des sciences moderne. Pour le dire simplement : Galilée avançait des hypothèses justes qu’il ne pouvait pas prouver et l’Église a agit par abus d’autorité.

Mon deuxième commentaire concerne la confusion souvent faite entre une théorie scientifique et ses interprétations. En gros et pour reprendre une citation de mémoire d’une phrase de B d’Espagnat  » une théorie scientifique est un ensemble de règles prédictives plus ou moins mathématisées auxquelles on associe une interprétation minimale pour pouvoir « manipuler » les concepts ». Dit autrement et pour prendre un exemple frappant, la physique quantique ne nous dit rien sur notre rapport au monde , sur la naissance de l’univers, …Par contre ces questions là sont reprises dans le cadre des interprétations de la physique quantique et il y en a plusieurs . C’est dans ce cadre interprétatif que la religion intervient encore ayant en grande partie ( voir l’encyclique Foi et raison ) déserté le champ des théories scientifique comme tel. Je reconnais que la physique classique ayant un caractère ontologiquement interprétable ( ce qui n’est plus aussi facilement le cas pour la physique quantique ) nous a fourni un paradigme dont on a eu et on a toujours du mal à se défaire. Une fois la distinction faite entre théorie scientifique et interprétation d’une théorie scientifique la question de la compatibilité entre science et religion prend une autre tournure. Entre science et religion il y a incompatibilité de fait et de droit. Entre interprétation scientifique et religion il y a souvent incompatibilté de fait mais pas de droit.

Bien cordialement, Pierre Leyraud

Bonjour Merci pour ces précisions. Néanmoins il ne faut pas forcer le sens de l’affirmation que vous relevez. Tout la monde sait bien que Galilée ne pouvait pas apporter la preuve de ce qu’il avançait. De même la science est une chose, l’interprétation scientifique en est une autre. Bien à vous.

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Bonsoir Je me demande depuis longtemps maintenant car je vous lis régulièrement, qu’est-ce que ces échanges avec nous, lecteurs de tous bords et de tous niveaux, vous ont apporté que ne vous ont pas apporté les cours en face à face au lycée? Merci à vous

Bonjour Le blog offre une tout autre expérience. D’abord par l’hétérogénéité de son public. Des lycéens et des étudiants bien sûr, mais aussi ce que l’on pourrait appeler « l’honnête homme », de tous âges, de toute condition sociale. Ensuite par le fait que la communication n’est pas court-circuitée par les conditions concrètes de l’intersubjectivité. Enfin par la liberté qu’il offre de supprimer quantité de messages (ce sont les plus nombreux) exhibant la bêtise et la bassesse, expérience que l’on ne fait pas, sauf exception dans une salle de classe, mais qui donne la mesure de l’abîme séparant la cité réelle de la cité « abstraite » qu’est l’école. Vous avez sans doute remarqué que je refuse la polémique, que mon blog n’est pas un forum et que mon exercice se limite à sa dimension pédagogique. Bien à vous.

Oui et merci pour tout ce que vous faites. J’espère très fort que « la bêtise et la bassesse » de certains ne vous découragent jamais de persévérer. Nous avons besoin de vous ! Bonne et heureuse année Axel

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Bonjour Madame,

Quand vous dites: « il n’y a pas en science de vérité éternelle et absolue. » Incluez-vous aussi les mathématiques? Je vous pose la question parce que j’ai le sentiment, qu’en mathématiques, une fois posés les axiomes, il y a des vérités qui me semblent indiscutables comme par exemple en géométrie euclidienne le fait que la somme des 3 angles d’un triangle est égale à 180 degrés ou que le rapport de la circonférence d’un cercle avec son diamètre est égal à Pi. Ou peut-être est-ce le terme vérité qui ne s’appliquerait pas aux mathématiques qui ne sont formées que d’axiomes, lemmes et théorèmes. Aussi en mathématiques, il n’y a pas comme en sciences expérimentales la confrontation entre théorie et pratique: c’est la théorie qui se confronte avec elle-même. Les mathématiques ont comme un rôle à part dans le domaine des sciences: c’est un outil si puissant et si efficace au service des sciences expérimentales qu’il y a certains mathématiciens et physiciens qui y voient la présence de Dieu. Et bravo pour votre analyse.

Bonjour « Absolu » signifie: qui ne dépend de rien, qui existe par soi. La vérité mathématique comme celle des autres sciences dépend des propositions de départ. Vous savez qu’on a renoncé en mathématiques à définir celles-ci par l’évidence. La notion d’axiome reçoit depuis l’invention des géométries non euclidiennes le sens traditionnel de « postulat », puisque ce qui était tenu pour vrai dans le système euclidien cesse de l’être dans les autres géométries. Bien à vous.

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En tant que musulman je trouve que le Coran présente la raison comme condition fondamentale nécessaire pour la compréhension : pour comprendre il faut raisonner. Ainsi lorsqu’il ramène notre regard sur les différentes formes idéales de ce monde : (Celui qui a créé sept cieux superposés sans que tu vois de disproportion en la création du Tout Miséricordieux. Ramène (sur elles) le regard. Y vois-tu une brèche quelconque ? Puis, retourne ton regard à deux fois : le regard te reviendra humilié et frustré) (LXVII, 3-4), il nous invite à réfléchir en éveillant en nous l’esprit de raisonner. Donc nous met sur la voie de la raison, celle qui, d’une réflexion émanant de sa vision dynamique du monde nous donne accès à la compréhension en nous éclairant l’acte créateur de Dieu qui a pour vocation de nous élever du relatif à l’absolu et du réel logique à l’imperceptible révélé. Où est donc l’incompatibilité entre la science et la religion ? Bien cordialement à vous

Bonjour Pendant longtemps, la théologie rationnelle dans le christianisme a aussi prétendu que la raison pouvait conduire à la vérité religieuse ou à ce que vous appelez « l’imperceptible révélé ». Sauf que de l’une à l’autre un saut est nécessaire qui est celui de la foi non celui du raisonnement pour les raisons qui sont explicitées. https://www.philolog.fr/foi-et-savoir/ Bien à vous.

Bonjour Madame Je partage avec vous votre avis de saut résidant dans la foi. Vous avez tout à fait raison de l’évoquer. Seulement ce saut ne doit pas constituer un hiatus, mais un pont, car pour instituer une science permettant de mieux appréhender le sens de notre existence, il nous convient de lire le monde dans l’unité et la complémentarité de la raison et de la vérité religieuse. En prenant la raison comme niveau d’observation, d’expérimentation et de réflexion et le révélé comme source d’inspiration dont le style parabolique de ses textes demande à faire usage de la raison pour en percevoir le véritable sens, nous pourrons nous mettre sur la bonne voie de compréhension du sens du monde, car le lien indissoluble existant entre la raison (laissée à sa neutralité) et le révélé qui sont les principales sphères de la connaissance fait que leurs vérités ne puissent jamais se contredire. Bien à vous

Bonjour Il n’y a pas de science possible du sens si l’on s’en tient à la définition précise de ce qu’est une connaissance de type scientifique. Le sens est ce qui s’interroge, se réfléchit, se pense mais pas ce qui se connaît. Je crains bien que vous donniez à la notion de science une extension illégitime ne permettant pas de saisir le fossé séparant un discours scientifique d’un discours religieux. https://www.philolog.fr/hannah-arendt-le-besoin-de-penser-nest-pas-lappetit-de-savoir/ L’analyse de Léo Strauss citée dans l’article est indépassable: « On ne peut esquiver le dilemme par un essai de conciliation ou de synthèse. Car toutes deux, la philosophie et les Ecritures, proclament qu’une seule chose est nécessaire : une vie de libre recherche pour l’une, une vie d’obéissance et d’amour pour l’autre ; or l’une est à l’opposé de l’autre. Dans tout essai de conciliation, dans toute synthèse, si remarquable soit-elle, l’un des deux éléments est sacrifié, subtilement peut-être mais à coup sûr (…) Si nous regardons de haut la lutte séculaire entre philosophie et théologie, nous ne pouvons guère manquer de penser qu’aucune n’a jamais totalement réussi à réfuter l’autre. Tous les arguments en faveur de la révélation n’ont de poids, semble-t-il, que si l’on présuppose la croyance en la révélation ; tous les arguments contre que si l’on admet l’incroyance au départ. Cet état de choses n’est que tout naturel. La révélation est si incertaine aux yeux de la seule raison qu’elle est toujours incapable de forcer son adhésion, et d’ailleurs l’homme est construit de telle façon qu’il peut trouver son bonheur, son accomplissement dans la libre investigation et dans la discussion de l’énigme de l’existence. Mais, d’un autre côté, il s’évertue si vivement à en chercher la clé et la connaissance humaine est toujours si limitée qu’il ne peut s’empêcher de ressentir le besoin d’une illumination divine, ni réfuter la possibilité de la révélation ». Droit naturel et Histoire. Bien à vous.

Bonjour Permettez-moi d’abord de vous préciser Madame, que bien que je porte interêt à la philosophie, je ne suis pas philosophe, mais géologue. Et dans le monde d’émerveillement que je trouve dans les secrets de la Terre, ce monde qui fait appel à notre intelligence, je vis dans cette science une sensation de transcendance qui me fait vivre le sens de ma vie au sein d’une harmonie de l’univers qui est aussi beauté, d’une interdépendance de ses entités qui est aussi solidarité et vie collective d’une unité qui guide à Dieu et offre une vision de haute motivation pour une vraie recherche scientifique. C’est ça ce que je constate. Dans cette vision je ne vois pas d’extension illégitime à la notion de science du moment qu’une science qui ne peut donner sens à notre existence ne peut mener qu’au desastre. Comme jadis il a été dit « une science sans conscience n’est que de la ruine ». Et c’est ce qu’on vit actuellement avec les confrontations, les problèmes des dérèglements climatiques qui ne sont que les résultats de ces manipulations scientifiques et techniques abusives qui mènent le monde vers des rivalités à dérives suicidaires. C’est vrai que la recherche scientifique doit être menée dans la liberté mais jusqu’à quelle limite du moment qu’il y’a des normes ethiques qui ne peuvent émaner que de de cette question de sens qui est à chercher non pas dans nos laboratoires et institus de recherche mais dans certaines épistémologies où l’absolu peut donner sens au relatif. Si la science avait entrepris sa carrière dans la bonne voie, soucieuse de cette question de sens qui est la source d’inspiration qui fait de l’homme un être lié, dans toute action, à Dieu et le libère de cette sensation suffisance qui au contraire le coupe de Dieu, il n’y aurait jamais eu ce fossé dont vous parlez entre elle et le discours religieux. En effet, un bilan concret des valeurs libératoires prodiguées dans les textes sacrés, montre que toute proclamation nous apparaissant de soumission, est en fait une annonce de libération qui nous émancipe de nos idées errantes et réprime nos passions appétissantes. D’où notre intérêt d’accoupler la science à cette notion de sens, car ce mariage nous permet d’entreprendre dans la bonne voie de la connaissance, celle qui nous libère de nous même, de notre individualisme, de notre positivisme qui sont autant des défauts qui nous égarent dans le matérialisme destructeur. Donc entreprendre dans la rectitude de la science, revient à s’engager dans l’investissement équitable des discours scientifique et religieux qui, en fait, doivent se mutualiser avec l’amélioration des facultés intellectuelles de l’homme. A l’intersection entre les deux, devrait s’élaborer un champ d’homogénéité connective où la connaissance du monde doit évoluer en harmonie avec l’évolution des facultés sensorielles, mentales et spirituelles de l’homme. Facultés qui, en dépit de nos existences mentales matérielles, n’obéissent pas aux seules quatre dimensions que l’on connait dans notre monde physique, mais se déroulent, depuis le berceau jusqu’à la tombe, avec une vélocité stimulée par une autre dimension qui sort du cadre de l’espace et du temps, faisant que des choses qui n’étaient que des rêves deviennent des réalités. Et c’est ça le secret de l’imaginaire dans le discours religieux qui dans le Coran, en nous fascinant par les merveilles de la terre par exemple, nous met sur la voie de son exploration en nous traçant l’itinéraire scientifique à suivre: (Dis : parcourez la terre et voyez comment Il (Allah) a commencé la création, puis Allah crée la génération ultime. Certes Allah est Omnipotent) (XXIX, 20). Il nous expose par cette démarche les faits en nous entraînant progressivement dans leurs contextes du perceptible au compréhensible pour nous mettre en fin dans le révélé. Et ce sont là les vraies valeurs de la liberté, car l’homme en tant qu’homme ne devient vraiment libre que lorsqu’il s’émancipe de soi même, de ses désirs, de ses appétits qui le rendent esclave de ses passions. C’est ainsi que l’homme pourra tant donner au monde de la science sans attendre de l’autre une récompense. Bien à vous

Bonjour Monsieur Permettez que je ne rebondisse pas sur votre message. Vous témoignez de votre foi et je respecte votre droit à croire ce que bon vous semble mais la foi n’interdit pas la possibilité d’un rapport critique à elle-même. A défaut il n’y a pas de réflexion philosophique envisageable or ce blog est un blog de philosophie. Bien à vous.

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Bonjour, Merci pour cette aide précieuse pour moi. Je suis en terminale et ma professeur a été absente de nombreux cours, il est donc difficile pour moi de comprendre ce chapitre avec un polycopié. Il faut que je rende un devoir et certaines questions sont compliquées pour moi. Pourriez-vous m’aider ? par MP ? Merci à vous par avance.

Bonjour Ce site n’est pas un site d’aide aux devoirs. Voyez la méthodologie de la dissertation: https://www.philolog.fr/methodologie-de-la-dissertation-philosophique/ Lisez certaines dissertations pour vous familiariser avec ce que signifie un développement dialectique. Bien à vous.

Bonjour, Merci de votre retour. Il ne s’agit pas d’une dissertation mais de répondre à 5 questions. Et il y en a 1 dont je ne comprends pas le sens. Je ne vous demande pas une réponse mais surtout de m’aider à la comprendre. Merci tout de même et bonne journée. Cordialement

Bonjour Posez cette question qui vous fait problème et je vous aiderai à la comprendre. Bien à vous.

Bonjour, 1-quel serait le danger d’une religion qui voudrait faire de son discours une vérité scientifique ? 2-quel serait le danger d’une science qui voudrait faire de son discours une vérité morale ? 1- je pense que la religion reste invérifiable et qu’en faire une vérité scientifique apporterait le mensonge. 2- je pense qu’une science qui serait fondée sur la foi amènerait à croire tout et n’importe quoi car non vérifié. Merci à vous et bonne fin de journée.

Bonjour Ces questions exigent de vous -d’approfondir la nature de la vérité scientifique, -de comprendre ce qui la distingue d’une vérité morale et d’une vérité religieuse, -de saisir les implications de ces différences. Vous devez donc commencer par analyser les caractéristiques de la vérité scientifique, en distinguant les sciences formelles et les sciences empirico-formelles. https://www.philolog.fr/science-et-philosophie/ Dans les unes la vérité est ce qui se démontre, dans les autres ce qui se vérifie. Dans les deux cas, la vérité fait l’accord des esprits. Elle a une valeur universelle. Il s’agit d’une vérité contraignante car les méthodes en jeu pour la construire permettent d’échapper à l’arbitraire des subjectivités et des fantaisies individuelles. Vous devez préciser ces significations en vous aidant des cours dont vous disposez sur ce blog ou ailleurs sur la toile. Par exemple: https://www.philolog.fr/a-quoi-reconnait-on-quune-theorie-est-scientifique/ https://www.philolog.fr/objectivite/ Cette analyse approfondie vous permettra de répondre à la première question. Ex: qu’implique l’idée d’une vérité contraignante? d’une vérité universelle? Pour développer ces significations vous devrez analyser ce qui caractérise la « vérité » religieuse. Idem pour la « vérité morale ». Voyez dans ce cours la partie sur les vérités du cœur. https://www.philolog.fr/les-criteres-de-lidee-vraie/ Bon travail.

Bonjour, Merci pour votre retour qui m’a bien aidée pour construire mes réponses. J’avais déjà répondu aux questions telles que : distinguez opinion, foi et savoir, résumez la différence entre discours religieux et scientifique, pourquoi on peut être homme de science et croyant. Je pense avoir bien compris ce chapitre et votre blog a été d’un grand secours ainsi que ses commentaires. Merci encore et bonne journée.

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Il semblerait que l’objectif de cet article est de déterminer si la science et la religion sont compatibles. A cette question je souhaite apporter trois opinions et perspectives.

I/ Y’a-t-il une différence entre la religion et la science ?

Une grande partie des religions ont pour dénominateur commun la foi. D’après Popper ce qui distingue la science de la religion est la réfutabilité (logique, méthodologique et empirique). D’après une ou plusieurs expériences X, Y et Z nous devons être en mesure de valider/réfuter des hypothèses et, si cette hypothèse est vérifiée alors elle est érigée en nouvelle vérité. La science progresse donc de manière itérative. Pour rattraper cette science qui avance et de surcroit pour la faire progresser, il faut donc en 2019 des connaissances pointues et/ou des outils spécifiques. Il me semble que le commun des mortels ne vérifie pas les théories scientifiques. Au regard du paysage scientifique en 2019 (nombreuses innovations technologiques, voyages dans l’espace etc) et de la difficulté de vérifier certaines théories avancées, il me semble pertinent de considérer que la science a aujourd’hui été érigé en nouvelle religion.

II/ Religions judéo-chrétiennes ou Religion tout court ?

Il a été admis que la religion et la science soient compatibles de fait. Cela est aisément envisageable si nous trouvons un scientifique travaillant sur un sujet spécifique et qui est croyant/pratiquant. En citant l’article « de conclure une incompatibilité de droit de la science et de la religion », je trouve qu’il y’a amalgame entre la religion -en général- et certaines religions -judéo-chrétiennes-. Le paragraphe cité de Léo Strauss est très pertinent mais n’est pas contre pas applicable à toutes les religions (concernant le postulat de départ sur la « la voie de la recherche » contre « la voie de l’obéissance) . La logique m’autorise à trouver un unique exemple (une religion) qui invaliderait l’affirmation sur l’incompatibilité de droit. Je crois que le taoïsme et le bouddhisme l’invalident.

III/ Est-ce nécessaire de déterminer la compatibilité de la religion/science en 2019 ?

Jusqu’à la renaissance la religion était la « source de vérité ». Fortement décriée ensuite jusqu’à nos jours, les limites de certaines religions sont évidentes : incohérences, modèles non applicables à la réalité perçue. La science a pris le relai et propose, elle, des modèles qui s’appliquent à notre réalité. La technologie (i.e. Internet) nous permet d’accéder à un ensemble de connaissances rarement possibles auparavant. Malgré cela la science a des limites car elle n’est capable de répondre aux problématiques métaphysiques. Par conséquent et plutôt que de considérer la religion comme un bloc conséquent de croyances et pratiques, peut-on sélectionner des idées de la religion (~spirituelles) pour répondre à ces questions métaphysiques ?

Dans ce cadre la religion (~ la spiritualité) et la science sont complémentaires.

Dans l’attente de votre retour, Xam

Bonjour Vos remarques sont intéressantes mais elles opèrent des glissements de sens obérant l’impératif de rigueur conceptuelle. 1) la question est de savoir si la religion et la science, en tant que telle, sont compatibles, or dans votre propos il n’est plus question de la science en soi mais de la manière dont elle fonctionne dans l’opinion. Ce que vous dîtes est pertinent mais hors sujet. 2) Il est juste de distinguer une religion d’une spiritualité mais là encore la question porte sur la religion proprement dite, non sur la spiritualité. 3) L’idée de complémentarité demanderait à être interrogée. Que les religions aient l’avantage d’apporter des réponses aux questions métaphysiques, c’est sûr, mais y a-t-il sens à dire qu’elles complètent un corpus théorique qui, par exigence méthodologique, ne s’en empare pas? La science n’a pas besoin de la religion pour être complète,(ce qu’implique l’idée de complémentarité), et réciproquement. Autrement dit l’hétérogénéité de la science et de la religion (tant dans leurs discours que dans leurs enjeux) rend problématique le recours à cette notion. Bien à vous.

[…] https://www.philolog.fr/la-science-est-elle-incompatible-avec-la-religion/?fbclid=IwAR1R3-0lRHMq3z5K&#8230 ; […]

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  • Quel est le rôle de la religion? Freud.
  • Présentation du chapitre X : la religion.
  • Athènes et Jérusalem. Léon Chestov.
  • Athènes et Jérusalem. Léo Strauss.

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dissertation la science et la religion sont elles compatibles

Le conflit entre science et religion est-il inévitable ?

dissertation la science et la religion sont elles compatibles

Professor of Geography and Intellectual History, Queen's University Belfast

dissertation la science et la religion sont elles compatibles

Emeritus Professor of Science and Religion, University of Oxford

Disclosure statement

Les auteurs de cet article ont débattu de ce sujet le 25 octobre 2018 dans le cadre d'une série de débats sur les défis mondiaux de l'Université Queen's de Belfast.

Queen's University Belfast provides funding as a founding partner of The Conversation UK.

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Dans son ouvrage écrit en 2015, Faith versus Fact , le biologiste et polémiste Jerry Coyne lançait une de ses nombreuses attaques contre les religions et ce, au nom de la science: science et religion, disait-il, « ne peuvent cohabiter, de la même manière que raison et déraison ne peuvent le faire ».

Ce genre de généralités se retrouve fréquemment au fil des siècles, faisant souvent référence à la condamnation de Galilée par l’Église catholique romaine en 1633, ou encore à la dispute au sujet de l’évolution survenue à Oxford en 1860 entre T. H. Huxley et l’évêque Samuel Wilberforce.

Ce type d’énoncé rejoint également la sphère publique. Le 16 septembre 2008, le professeur Michael Reiss, un biologiste évolutionniste, a démissionné de son poste de directeur de l’éducation de la Royal Society. Son départ était en lien avec des propos tenus sur l’enseignement scientifique des origines. Il aurait dit: « Le créationnisme doit être évalué par les scientifiques non comme une idée fausse, mais bien comme une vision du monde. »

Peu avant cette démission, le prix Nobel Sir Richard Roberts, avait écrit au président de la Royal Society, Sir Martin Rees, exigeant « la démission ou le renvoi dès que possible du professeur Reiss ». « Nous constatons que le professeur Reiss est un ecclésiastique, ce qui est inquiétant en soi ». Sa lettre se poursuit ainsi:

Qui donc a pu s’imaginer qu’il puisse être un bon directeur de l’éducation, qualifié pour répondre à des questions sur les différences entre science et religion de manière scientifique et rationnelle?

Commentant cet incident dans la revue New Scientist , un autre Nobélisé, Sir Harold Krolo, de poursuivre:

Il est impensable qu’un pasteur, dont la pensée centrale repose en grande partie, sinon en totalité, sur un dogme invérifiable, puisse présenter avec honnêteté et impartialité un argumentaire scientifique fondé sur la libre pensée et le doute.

Complications

Ces affirmations suggèrent implicitement l’inévitable combat opposant science et religion. Mais ce postulat ne peut en soi faire comprendre l’infinie diversité des liens tissés entre science et religion.

Les sciences sont nombreuses, les religions tout autant. Une découverte scientifique peut s’avérer problématique pour certaines religions, mais sans conséquence pour d’autres. Une science peut menacer des croyances religieuses, alors que d’autres sont ressenties comme anodines. Soutenir qu’il existerait un conflit fondamental entre science et religion est voué à l’échec, car comme l'a écrit le philosophe John Gray, les mots « religion » et « athéisme » sont dépourvus d’essence.

dissertation la science et la religion sont elles compatibles

Si les sciences peuvent parfois fournir des réponses aux interrogations soulevées par les traditions religieuses, il reste néanmoins un espace pour le questionnement et l’engagement religieux. Comment sont établies les priorités en recherche? Compte tenu de ressources limitées, nous nous devons en premier lieu de déterminer ce qui est le plus important pour l’humanité.

Il ne s’agit pas ici de raisonnement scientifique. Tel que l’historien Noah Yuval Harari l’a décrit dans son livre à succès Sapiens , seules les religions et les idéologies peuvent répondre à ces interrogations: « La recherche ne peut s’épanouir qu’au travers d’un lien à une religion ou une idéologie ».

Parce que science et religion sont à la fois interdépendantes et conflictuelles, l'histoire de leur interaction est complexe.

Points chauds et zones d’échange

On trouve historiquement de nombreuses situations où science et religion se sont opposées. Appelons-les « points chauds ». Parmi ceux-ci, le refus des miracles par les tenants du point de vue que la nature fonctionne selon des lois incontournables . Ou encore le déni de la liberté humaine prôné par ceux qui voient l‘esprit de l’être humain comme un simple assemblage chimique du cerveau.

Au début du 17ème siècle, certains catholiques jugèrent les théories matérialistes troublantes car elles entraient en conflit avec leur interprétation de l’Eucharistie. Pour certains Juifs, le bannissement de l’astrologie entre les années 200 et 500 AD constituait une entrave à la recherche astronomique. Quant à ceux qui interprètent la bible de façon littérale, la théorie de l’évolution selon Darwin déclenche un réflexe de rejet.

Par contre, l’on trouve bien des points d’entente et d’enrichissement réciproque. Appelons-les « zones d’échange ». Par exemple, l’idée biblique que l’humanité descendrait d’une source unique. Cette pensée a mené à une réflexion sur l'origine du langage ainsi que sur la dispersion des êtres humains sur la planète .

Au 17ème siècle, certaines inventions scientifiques telles que le télescope et le microscope étaient destinées à inverser la chute d'Adam de son piédestal . Ces instruments et leur méthodologie scientifique furent conçus afin de réparer les capacités cognitives et sensorielles de l’être humain, endommagées par le péché.

Regardons le débat sur la création du monde. Cette idée constitue la pierre angulaire du développement de la science écologique . C’est en partie grâce à la croyance que Dieu aurait adapté animaux et plantes à leur environnement qu'ont été rédigés des traités essentiels d’histoire naturelle soulignant les corrélations entre organismes et environnement.

dissertation la science et la religion sont elles compatibles

De nos jours, un dialogue entre anthropologues théologiques et partisans du transhumanisme – qui prônent l’usage de la science et de la technique afin d’améliorer la condition humaine – pourrait être bénéfique. Les avancées technologiques soulèvent de profondes questions sur le sens de l’humanité, un sujet sur lequel les théologiens ont beaucoup à dire. Au minimum, la théologie peut contribuer à l’élaboration des valeurs en vertu desquelles devraient être priorisées les capacités humaines qu’il convient d’améliorer.

La survie de la religion

Chacun répondant à des impératifs différents, le risque de tensions, dissensions, et même d’animosité entre religieux et scientifiques demeurera omniprésent. Mais cela ne veut pas dire que la guerre est inévitable. La science laisse indifférents de nombreux croyants. Et beaucoup de scientifiques se distancient de la religion. La méfiance réciproque est souvent de mise. Mais - et j’insiste - l’indifférence, la distanciation et la méfiance ne sont pas la même chose que la guerre.

Les mots « science » et « religion » ont subi de profondes transformations sémantiques. Ce n’est qu’à partir de la seconde moitié du 19ème siècle que la « science » est devenue une sorte de parapluie de convenance regroupant des domaines empiriques spécialisés, supposément mais pas toujours, liés par une « méthodologie scientifique » commune.

Les religions peuvent-elles survivre à notre société technologique? C’est déjà le cas, et ce pour une raison fort importante. Elles fournissent une identité, et cherchent à donner un sens aux événements, à interpréter l’univers, pas nécessairement à le comprendre. Comme le disait Terry Eagleton : « L’erreur consistant à croire que la religion serait une tentative ratée d’explication du monde… équivaut à considérer le ballet comme une tentative ratée de rattraper l’autobus. »

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Science et religion sont-elles nécessairement incompatibles ?

Extrait du document.

« Le mot religion vient du latin « religare » : ce détour par l'étymologie nous permet de voir que le propre de la religion est d'être une institution sociale dont l'une des fonctions est de « relier » les hommes (c'est le sens du verbe religare). Elle ne les relie pas comme le ferait une quelconque association d'individus mais dans le sentiment de l'existence d'une réalité surnaturelle, dépassant les hommes. Cette réalité est celle de la divinité, entendue (pour le dire avec une abstraction suffisante pour englober toutes les manifestations précises de cette idée) comme une force surnaturelle, infiniment sage et puissante, présidant aux destinées de l'homme et de l'univers. Au sens large, la science est pour un sujet la possession d'un savoir complet, achevé et conscient de lui-même. Plus précisément, on nomme science une recherche qui définit un objet à connaître et procède par hypothèses afin d'atteindre une vérité objective en les confirmant ; elle est donc absolument impossible à achever. Deux choses sont incompatibles lorsqu'elles sont contraires et impossibles à penser ou faire fonctionner entre elles. Dire que la science et la religion sont incompatibles signifie qu'elles se rejettent mutuellement, qu'il est impossible de les pratiquer ensemble, de sorte que l'homme qui embrasse la science rejette obligatoirement la religion, et inversement. Nous nous demanderons si le rapport de la science et de la religion est un rapport d'exclusion nécessaire, contingent, ou si au contraire science et religion ne seraient pas dans un rapport situé au-delà de l'idée d'incompatibilité : celui de l'indépendance absolue. I. Science et religion sont nécessairement incompatibles Le sacré et le profane : deux domaines incompatibles A première vue, science et religion sont nécessairement incompatibles, car elles relèvent de deux domaines absolument contraires. En effet, la religion appartient au domaine du sacré, toute religion sépare en effet l'espace social, les êtres et les choses en deux espaces distincts : le consacré, l'inviolable, et tout le reste, relégué dans le profane. Cette distinction suscite effroi et fascination chez les hommes. A l'inverse, la science est un domaine où chacun peut s'inviter au moyen de sa raison, un domaine où l'on ne trouve que la froideur de l'intellect. Religion et science sont donc nécessairement incompatibles. L'altérité du rôle de la raison dans la science et la religion Le rôle de la raison est au centre de cette incompatibilité entre science et religion. En effet, la science requiert nécessairement l'usage de la raison, il n'y a pas de science sans raison. A contrario, certaines religions peuvent fort bien exiger l'abdication de tout esprit critique chez les fidèles, substituer une parole institutionnelle toute puissante à la réflexion de l'individu. Science et religion sont incompatibles car elles réclament et forment deux types différents d'individus. II. L'incompatibilité de la science et de la religion est uniquement contingente Une frontière plus ténue qu'il n'y parait entre science et religion Cependant, science et religion ne sont peut être pas nécessairement incompatibles, mais uniquement en fonction de situations contingentes.

Nous pouvons notamment remarquer que science et religion sont susceptibles de se confondre, que le discours religieux peut être considéré comme une forme primitive de discours scientifique. En effet, si la science est une démarche cherchant à établir la vérité, la religion a pu se donner une telle fin : il existe notamment une science de la religion (la théologie) et un discours religieux sur le monde, son origine et ses fins que l'on peut assimiler au discours scientifique. La science au service de la religion Mais il arrive également que la science se fasse la servante de la religion, que les conclusions de la science servent à l'édification des croyants. En effet, le discours biblique, par exemple, peut recevoir une forme de confirmation, un crédit supérieur, dès lors que la science va accréditer certaines de ses déclarations. La découverte scientifique de l'existence réelle d'un homme en tous points semblable à Jésus peut servir de soutien aux déclarations du Nouveau Testament. III. Les rapports de la science et de la religion ne se pensent pas en termes de compatibilité, mais d'indépendance absolue L'altérité des facultés propres à la pensée religieuse et scientifique Néanmoins, il semble que les rapports de la science et de la religion se situent au-delà du problème de leur compatibilité. Science et religion répondent à des facultés distinctes, comme l'écrit Pascal dans la 278em « pensée » : « C'est le cœur qui sent Dieu et non la raison. Voilà ce que c'est que la foi : Dieu sensible au cœur, non à la raison ». La science s'adresserait donc à la raison de l'homme et la religion à une faculté non rationnelle : ce que Pascal nomme le « cœur ». Deux discours hétérogènes sur le monde En définitive, science et religion tiennent des discours hétérogènes sur le monde, qui sont à la fois incompatibles et indépendants. Incompatibles, car dans leur contenu ils peuvent s'opposer et se contredire. Indépendants, car le discours sur le monde de la religion s'adresse à la foi de l'homme, à sa capacité à admettre certaines idées sans le secours de l'esprit, alors que la science s'adresse exclusivement aux facultés rationnelles du sujet. Conclusion : Science et religion sont en apparence dans un rapport de nécessaire incompatibilité, puisque l'une relève du profane et l'autre du sacré, l'une fait appel à la raison et l'autre peut en exiger l'abandon. Mais cette incompatibilité est contingente plutôt que nécessaire, puisque la religion peut être considérée comme une forme de science, et la science peut venir confirmer certains points de doctrine religieuse. En définitive, science et religion sont moins incompatibles qu'indépendantes : on peut être scientifique et croyant en même temps, car la science s'adresse aux facultés rationnelles du sujet et la religion à sa capacité à croire sans preuves.. »

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La science s'oppose‑t‑elle à la religion ?

Texte 6 la science s'oppose au dogmatisme.

Bertrand Russell

  • Croire / Savoir p. 365

Texte 7 Croire n'est pas savoir

Blaise Pascal

  • Transcendant / Immanent p. 365

Le pari pascalien

Texte 8 crainte et superstition.

Spinoza

Que l'auteur déclare-t-il ?

Texte 9 le savoir cache une croyance.

Friedrich Nietzsche

Commentaire

Croire en la vérité .

  • Question : Sans cette foi en la vérité, la démarche scientifique serait‑elle déclenchée ?
  • Objectif : Montrer qu'une forme de religiosité, de croyance, est nécessaire pour entreprendre la démarche scientifique, ce qui n'empêche pas d'interroger ce point de départ par la suite.

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La science peut-elle faire disparaître la religion ?

La religion.

phiT_1109_07_00C

France métropolitaine • Septembre 2011

dissertation • Série L

La science peut-elle faire disparaître la religion ?

Les clés du sujet

Définir les termes du sujet

Au sens large, le mot désigne un savoir. De façon plus précise, c'est un savoir fondé, démontré , qui ne varie donc pas avec les circonstances. Science s'oppose ainsi à opinion. La connaissance scientifique moderne implique l'idée d' expérimentation .

C'est une pratique collective structurée par des rites, des cultes, par lesquels une communauté de croyants affirme être liée à un ou plusieurs dieux garants de l'ordre et de la justice. Sur le plan subjectif, chaque membre du groupe est animé par une foi dans l'existence et la bienfaisance de ces divinités.

Faire disparaître

Cette expression sous-entend la présence d'un processus . La science est-elle une démarche conquérante qui, dans son parcours, chasse la religion des domaines qu'elle occupait ?

Le verbe pouvoir

Il a ici d'abord le sens de la possibilité  : la science a-t-elle les moyens de provoquer la disparition de la religion ? Un deuxième sens, celui de la légitimité , apparaîtra aussi.

Dégager la problématique et construire un plan

La problématique.

Science et religion ont eu, et ont encore parfois, des relations conflictuelles comme si toute avancée de la première signifiait un recul de la seconde. Il faut donc qu'elles aient une prétention commune . Quelle est-elle et devons-nous penser que leurs relations soient telles que les avancées de l'une chassent l'autre ?

Dans un premier temps, nous verrons les présupposés expliquant l'existence d'un conflit. Puis, nous aborderons les grands thèmes de la critique de la religion . Enfin, nous nous demanderons si la prétention scientifique à faire disparaître la religion ne révèle pas une méconnaissance par la science des limites de son domaine.

Éviter les erreurs

Faire une copie simplificatrice en faveur d'une des deux notions.

Les titres en couleurs servent à guider la lecture et ne doivent en aucun cas figurer sur la copie.

Introduction

Il est courant d'entendre opposer la science et la religion. Nous avons le sentiment que chaque avancée de l'explication scientifique se traduit par un recul des croyances religieuses. Des raisons existent à cela. L'Europe a été marquée par des conflits retentissants entre ces deux modes de pensée, comme en témoigne la condamnation de Galilée, et l'époque des Lumières a estimé que la religion était une superstition qui disparaîtrait avec les progrès des sciences de la nature.

Cependant, il est clair qu'aujourd'hui, le développement de la connaissance scientifique n'a pas supprimé la pensée religieuse. N'est-ce qu'une question de temps ou doit-on penser que la religion est un phénomène plus complexe ou plus étendu que la représentation que les Lumières s'en faisaient ?

1. Présupposés du sujet

A. démarche scientifique et attitude religieuse.

Les Grecs entendent par science un exercice du raisonnement dont la démonstration est la plus haute manifestation. La raison procède en suivant des règles de logique dont la fixité et l'impersonnalité tranchent avec l'inconstance des opinions courantes. Le géomètre, le mathématicien découvrent les propriétés immuables des figures et des nombres. Ils cherchent la connaissance des choses, alors que les opinions sont des jugements partiels et intéressés. La science est de l'ordre de la théorie , alors que la religion possède dès l'origine une dimension pratique que Durkheim a fortement soulignée. La religion est un « système solidaire de croyances et de pratiques », distinguant le sacré du profane et capable d'unir des individus dans une communauté dont ils se sentent les membres. Cette dimension sociale est importante au point que Bergson a pu écrire qu'il n'y a jamais eu de société sans religion alors que la science et la philosophie n'ont pas toujours existé. Les liens unissant des fidèles entre eux, par la médiation d'un lien commun à une autorité sacrée, ont un pouvoir de structuration, ils sont une sorte de ciment social. La religion apparaît donc comme une pensée globalisante.

B. Une question de domaine

La différence entre théorie et pratique ne suffit cependant pas à dire pourquoi la science pourrait faire disparaître la religion. Envisager ce phénomène implique que la première intervienne de façon offensive sur le terrain où la seconde la précédait. Deux questions se posent alors. Quel est ce domaine ? Quelles sont les caractéristiques de ces deux modes de pensée ? La réponse à la première question nous est donnée par l'Histoire. Il est indéniable que la science est entrée en concurrence avec les récits religieux touchant la nature , son ordre et ses lois, et qu'elle a pris parfois position dans les débats touchant la formation ou l'origine du monde . Dès lors, elle prenait une dimension métaphysique et elle mettait en cause les représentations religieuses, selon lesquelles l'ordre de l'univers ne pourrait venir que de l'action de puissances divines dont l'intelligence est à reconnaître dans les phénomènes qui nous entourent et dont la sagesse est à honorer dans des cultes.

[Transition] Ce point permet de saisir la racine du conflit dont le sujet fait état.

2. Les raisons du conflit

A. la séparation du mythe et de la raison.

Il est frappant d'apprendre qu'Anaxagore, un grand astronome grec, fut accusé d'athéisme et emprisonné pour avoir dit que le soleil était une pierre brûlante. Cette affirmation ôtait à cet astre son caractère sacré et l'intégrait dans l'univers matériel où les hommes vivent quotidiennement. L'attitude scientifique se marque par la volonté de découvrir la vraie nature et les vraies causes des phénomènes . Le développement du discours rationnel s'est fait en critiquant les récits religieux, c'est-à-dire les mythes . Le mythe est une narration touchant la naissance et le développement de l'ordre qui gouverne l'univers. Ses histoires mettent en jeu des divinités qui s'affrontent et accomplissent des exploits dans une dramaturgie dont le but est de célébrer la victoire de l'ordre sur les puissances de confusion. Or, les premiers physiciens présentent une pensée du cosmos en rupture avec cette façon de procéder. La science raisonne à partir de qualités abstraites comme « le froid », « le chaud », « le sec », « l'humide », et remplace les péripéties guerrières par des rapports mathématiques de proportionnalité. L'ordre est le résultat de relations équilibrées entre des couples d'opposés. Dès lors, le mythe devient synonyme de fable, donc de récit mensonger et absurde.

B. La dénonciation de la superstition religieuse

Ce premier coup porté aux prétentions explicatives de la religion ouvre la voie à sa définition comme une superstition . Spinoza considère que les cultes sont l'aboutissement de deux illusions qui s'enchaînent. L'ignorance native des hommes les pousse à imaginer être le centre de référence de la nature. La conscience de poursuivre des buts nous fait croire que tout ce qui nous entoure fait de même et, comme nous savons que nous ne sommes pas les auteurs des choses naturelles, nous croyons qu'elles ont été créées par des « directeurs de la nature » et nous leur rendons des hommages afin qu'ils nous soient favorables. À l'anthropocentrisme s'ajoute l'anthropomorphisme qui projette la forme et les passions humaines sur l'ensemble des phénomènes. Cette illusion s'explique par l'ignorance et par le désir de pouvoir agir sur notre milieu. La personnification des éléments naturels rend possible l'établissement d'une relation entre eux et nous. Spinoza trace ainsi le portrait de l'homme superstitieux, ignorant et angoissé, qui croit aux présages et honore des puissances supérieures pour satisfaire ses intérêts.

La science, en revanche, écarte l'idée des causes finales. Elle cherche à répondre à la question du «  comment  » et considère la nature comme un objet à étudier par le calcul et l'expérimentation. Max Weber parle de « désenchantement du monde » pour qualifier l'action de la raison scientifique à travers le temps. Les phénomènes s'expliquent par des lois et sans référence à nos désirs. À l'image d'un monde centré sur l'homme, « image de Dieu », la science physique substitue le concept d'un univers indifférent à nos souhaits et à nos craintes. Quant aux sciences naturelles, elles étudient l'histoire de notre espèce et la structure de son organisme sans y voir l'intention d'une intelligence supérieure.

[Transition] L'idée du désenchantement exprime bien le fait que les sciences ont fait reculer la religion, mais cela suffit-il à penser que leur progrès conduirait à la faire disparaître ?

3. Les limites de la science

A. la tentation scientiste.

La connaissance de la nature est devenue le domaine des sciences expérimentales, qui ne se bornent pas à décrire le réel mais l'interrogent en construisant des expérimentations de plus en plus précises, contrôlées et rendues possibles par un appareillage technique dont la sophistication ne cesse de croître. Le quantifiable, le reproductible sont les valeurs maîtresses de ces démarches. Aux récits généraux et symboliques, la science substitue la recherche de laboratoire où la théorie rend possible le développement de mesures pointues et leur expression dans une forme symbolique abstraite comme une équation. Une expérimentation n'est pas une simple observation de faits mais présuppose l'admission de plusieurs théories et la maîtrise d'un appareillage complexe.

Ces avancées ont pu faire croire que la science gouvernerait la totalité des affaires humaines. Le positivisme d'Auguste Comte en donne une expression très nette. Comte élabore la loi des trois états qui définit la période scientifique comme l'achèvement de deux âges antérieurs et imparfaits. Ainsi, l'humanité a commencé par une période théologique, dans laquelle l'ignorance des hommes les conduisit à croire en l'action de causes surnaturelles et cachées. Puis vint l'époque métaphysique, qui rationalisa ces fictions en parlant de causes premières et finales mais resta dans les erreurs de l'abstraction. Enfin, l'âge scientifique ou « positif » se libère de ces illusions pour n'étudier que les lois gouvernant les phénomènes, avec un esprit animé par le souci de la certitude et de la précision . Comte parle d'un progrès qui élimine les croyances dans une ou plusieurs divinités. La science dégage les lois de tous les phénomènes pour être la pensée universelle. On nomme cette prétention le scientisme .

B. Les deux ordres

On note toutefois que si la religion a quitté le terrain de la connaissance de la nature elle n'a pas disparu. Notre époque est même marquée par un retour du religieux. N'est-ce pas en raison de sa capacité à prendre en charge des angoisses auxquelles les sciences n'ont rien à dire ? Freud considère la religion comme une illusion, mais il reconnaît qu'elle réalise les « désirs les plus anciens, les plus forts, les plus pressants de l'humanité. » La détresse infantile suscite le désir de protection, la crainte de la mort et l'expérience des souffrances de la vie sont la cause d'un désir puissant de justice et de sens . L'absence de preuves ne nuit pas à la religion, elle prend sa source dans des sentiments liés à notre condition, non dans des démonstrations ou des expérimentations élaborées. Freud soutient que cette illusion ne peut décliner que si « notre dieu le logos » arrive à montrer à l'humanité qu'elle doit s'organiser par elle-même. Il nomme cela « l'éducation en vue de la réalité » et fait valoir l'extrême jeunesse de la pensée scientifique pour fonder sa croyance dans une disparition possible du phénomène religieux.

On peut toutefois se demander si Freud ne confond pas deux registres. La foi est une certitude subjective , issue d'une adhésion à un appel intérieurement ressenti. C'est une donation de sens qui se reçoit avant toute critique, quand la science cherche l'objectivité à travers la mise en place de procédures contrôlées. Il y a, comme le dit Pascal, deux ordres : « c'est le cœur qui sent Dieu et non la raison. Voilà ce qu'est la foi : Dieu sensible au cœur, non à la raison. » Les valeurs morales, l'interrogation sur la condition temporelle de l'homme, ne sont pas du ressort scientifique. La mort est pour le naturaliste un phénomène naturel et nécessaire, mais elle est pour chacun de nous une douleur quand nous perdons un proche. Dès lors comment la penser ? Est-ce un terme, un passage ? La liberté de la conscience est ici en jeu et elle est porteuse d'un droit qui n'est pas justiciable d'une approche scientifique.

Il est incontestable que les avancées multiples de la science dans le domaine de la connaissance de la nature ont fait reculer les récits religieux en les rabaissant au rang de mythes. Aujourd'hui, la religion ne cherche plus guère à rivaliser sur ce terrain, même si certains croyants rejettent encore Darwin. Elle reste toutefois présente sur les questions de choix moraux et constitue pour certains une réponse face à leur demande de sens. La spécificité de l'expérience de la foi la situe sur un autre plan que celui des expérimentations scientifiques, ce qui devrait empêcher les empiétements réciproques.

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Libre opinion Les relations entre la science et la religion

Les relations entre la science et la religion.

  • [Libre opinion]

Les nouvelles recherches, affirme l'auteur, veulent élucider les origines évolutionnistes des comportements religieux.

Ils sont de plus en plus nombreux à croire que la science est en voie de remplacer la religion du fait qu’elle réussit à répondre à de plus en plus de questions et à dissiper de plus en plus de mystères. Toutefois, dans la littérature scientifique, de nombreux articles font état des travaux de chercheurs en neuropsychologie, en sociologie, ainsi qu’en anthropologie qui, s’inspirant de la théorie de l’évolution, sont en voie d’ajouter de nouvelles dimensions à une problématique qui, désormais, ne devrait plus être abordée de façon binaire.

D’abord, ces chercheurs nous rappellent que plusieurs des grands problèmes qui traumatisent les êtres humains relèvent du domaine de l’imprévisible et, par conséquent, sont intraitables. À témoin, plusieurs signalent que les désastres naturels sont le plus souvent associés à des phénomènes de nature chaotique ; d’autres citent la cruauté inhérente des êtres vivants, incluant les hommes. Va pour la candidature de la science comme remède à tous les maux de l’humanité. Néanmoins, si l’on veut redéfinir la problématique de la science par rapport à la religion, il faut sûrement tenter de comprendre davantage pourquoi les êtres humains continuent en aussi grand nombre à croire aux phénomènes surnaturels. C’est ce à quoi s’intéressent des chercheurs multidisciplinaires.

Jusqu’à récemment, les scientifiques ont été plutôt prudents quant aux questions traitant de Dieu et de religion. Darwin a attendu trente ans avant de publier sa théorie de la sélection naturelle pour expliquer l’origine des espèces. Il avoua, vers la fin de son essai, que même s’il hésitait à attribuer autant de merveilles et d’immensité au pur hasard, il ne se résignait pas à invoquer l’intervention d’un être suprême. Il s’en excusait. D’une part, il doutait « que l’esprit de l’homme, qui est issu de l’évolution de formes de vie primitives, puisse tirer de si grandes conclusions ». D’autre part, il se disait incapable de concevoir qu’un monde dans lequel on retrouve tant de misère puisse être l’oeuvre d’un Dieu tout-puissant.

Se tourner vers la religion

Par ailleurs, les critiques de la science se plaisent souvent à nous souligner que celle-ci est loin d’être parfaite. Ils ont sans doute raison ; mais pas pour les bonnes raisons. La science n’est pas imparfaite parce qu’elle ne peut pas répondre à toutes les questions. Et surtout pas à celles qui portent sur les « pourquoi » de l’existence ou, encore, sur les notions de nature métaphysique, tels le libre arbitre ou le sens inhérent de la vie.

On rapporte que, sur son lit de mort, la grande écrivaine américaine, Gertrude Stein, aurait chuchoté à sa compagne : « Quelle est la réponse ? » Devant le silence prolongé de cette dernière, elle aurait enchaîné : « Alors, quelle est la question ? » Ainsi, à ceux qui exigent des réponses aux questions existentielles, on pourrait rappeler le principe développé par les philosophes de l’école d’Oxford selon lequel il ne suffit pas à une expression langagière d’avoir la forme d’une question pour en être une. Encore faut-il qu’elle traite d’une matière qui, en principe, est accessible à une enquête empirique. Dans cette optique, les questions qui commencent par « pourquoi » n’en seraient pas. Pour sa part, la science s’attarde surtout aux questions qui portent sur le « comment » des phénomènes.

C’est justement sur le phénomène de ceux qui se tournent vers la religion pour avoir des réponses aux problèmes de l’existence que se penchent les nouvelles recherches. Celles-ci veulent élucider les origines évolutionnistes des comportements religieux.

L’hypothèse qui sous-tend ces recherches veut que les êtres humains aient évolué de manière telle qu’ils naissent désormais prédisposés à accueillir le sacré et à invoquer des causes surnaturelles pour les « conforter dans leur incompréhension des phénomènes de la nature et de l’existence précaire qui est leur sort ». Dans le langage de l’évolution, ce trait se serait avéré un facteur de sélection positif.

Supposons maintenant que cette hypothèse soit fondée et qu’il soit généralement admis que les hommes sont naturellement enclins à la religion. Doit-on conclure pour autant que la religion est nécessairement bénéfique pour l’humanité ? À mon avis, rien n’est moins certain. Si la prédisposition au sacré est du domaine des instincts, ce phénomène doit être l’objet d’une étude critique au même titre que n’importe quel autre phénomène naturel.

À ceux qui s’en scandaliseraient, il faudrait rappeler la remarque de Daniel C. Dennett, se portant à la défense de Darwin, selon laquelle « le seul sens de la vie qui vaut la peine d’être défendu est sûrement celui qui peut survivre à nos meilleurs efforts pour l’examiner ».

Ce texte fait partie de notre section Opinion, qui favorise une pluralité des voix et des idées en accueillant autant les analyses et commentaires de ses lecteurs que ceux de penseurs et experts d’ici et d’ailleurs. Envie d’y prendre part? Soumettez votre texte à l’adresse [email protected] . Juste envie d’en lire plus? Abonnez-vous à notre Courrier des idées .

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La religion est-elle contraire à la raison ?

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I. Analyse conceptuelle de la religion et de la raison

La religion est un système de croyances et de pratiques qui vise à établir une relation entre l’homme et le sacré ou le divin. Elle est souvent associée à des rituels, des codes moraux, des textes sacrés et des institutions. La religion est généralement perçue comme une source de sens et de direction dans la vie, offrant des réponses aux questions fondamentales de l’existence.

La raison, quant à elle, est la faculté de l’esprit humain qui permet de penser, d’analyser, de comprendre et de juger. Elle est souvent associée à la logique, à la pensée critique et à la science. La raison est généralement perçue comme un outil pour découvrir la vérité, résoudre des problèmes et prendre des décisions éclairées.

Il est important de noter que ces deux concepts ne sont pas nécessairement mutuellement exclusifs. Comme l’a dit Albert Einstein : « La science sans religion est boiteuse, la religion sans science est aveugle ». Cela suggère que la religion et la raison peuvent coexister et se compléter mutuellement.

II. Les arguments en faveur de l’opposition entre religion et raison

L’un des principaux arguments en faveur de l’opposition entre religion et raison est que la religion repose souvent sur la foi, qui est définie comme une croyance sans preuve. Par exemple, de nombreuses religions exigent la croyance en des miracles, des révélations divines et des événements surnaturels qui ne peuvent pas être prouvés ou expliqués par la raison. Comme l’a dit le philosophe David Hume : « Un miracle est une violation des lois de la nature ; et comme une ferme et inébranlable expérience a établi ces lois, la preuve contre un miracle, tirée de la nature même de la chose, est aussi complète que toute preuve tirée de l’expérience peut l’être ».

Un autre argument est que la religion peut parfois entraver la pensée critique et la liberté intellectuelle. Par exemple, certaines religions interdisent le questionnement ou la remise en question de leurs doctrines et dogmes. Comme l’a dit le philosophe Friedrich Nietzsche : « La foi : ne pas vouloir savoir ce qui est vrai ».

Enfin, il y a l’argument que la religion et la raison ont des objectifs différents. La religion cherche à fournir un sens et un but à la vie, tandis que la raison cherche à découvrir la vérité objective. Comme l’a dit le philosophe Bertrand Russell : « La religion est basée, je pense, principalement et avant tout sur la peur… la peur de l’inconnu, la peur de la mort, la peur de la défaite, la peur de l’obscurité ».

III. Les arguments contre l’idée d’une contradiction entre religion et raison

Cependant, il y a aussi de nombreux arguments contre l’idée d’une contradiction entre religion et raison.

Premièrement, il y a l’argument que la foi et la raison ne sont pas nécessairement incompatibles. Comme l’a dit le philosophe et théologien Saint Thomas d’Aquin : « La foi et la raison sont comme deux ailes sur lesquelles l’esprit humain s’élève à la contemplation de la vérité ».

Deuxièmement, il y a l’argument que la religion peut être rationnelle dans le sens où elle fournit une explication cohérente et globale de l’univers et de l’existence humaine. Comme l’a dit le philosophe William James : « La fonction de la religion est de satisfaire certaines demandes de la nature humaine ».

Enfin, il y a l’argument que la religion et la raison peuvent se compléter mutuellement. La religion peut fournir des valeurs morales et un sens à la vie, tandis que la raison peut aider à comprendre et à interpréter les textes sacrés et les doctrines religieuses. Comme l’a dit le philosophe Paul Tillich : « La religion est la substance de la culture, la culture est la forme de la religion ».

IV. Synthèse et perspectives : la religion et la raison peuvent-elles coexister ?

En conclusion, il est clair que la relation entre la religion et la raison est complexe et nuancée. Il y a des arguments convaincants des deux côtés, et il est probable que la vérité se situe quelque part entre les deux.

Il est possible que la religion et la raison puissent coexister et se compléter mutuellement. La religion peut fournir un sens et une direction dans la vie, tandis que la raison peut aider à comprendre et à interpréter le monde. Comme l’a dit le philosophe Alfred North Whitehead : « La religion sera ce que la raison reconnaîtra comme telle ».

Cependant, il est également important de reconnaître que la religion et la raison peuvent parfois entrer en conflit. Dans ces cas, il est essentiel de maintenir un esprit ouvert et critique, et de chercher à concilier la foi et la raison autant que possible.

En fin de compte, la question de savoir si la religion est contraire à la raison est une question qui nécessite une réflexion approfondie et une discussion ouverte.

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Dossier • Science et religions

Science, philosophie, religion : quels rapports .

Peut-on « sauver » la religion ? Cette question peut sembler saugrenue tant les religions semblent se porter à merveille, à l’échelle du monde. Mais ce qui est curieux c’est que, dans une Europe relativement déchristianisée, la religion est redevenue, aux yeux de beaucoup de non croyants, intellectuellement respectable. Tant que la religion s’exprime sous une forme « modérée », elle est perçue comme compatible avec la démocratie, la science, la laïcité, l’égalité homme/femme, etc. Mais cette position est-elle intellectuellement défendable ?

Science et religion

Un sondage publié en août 2010 par l’hebdomadaire Le Point [1], fait auprès de 16 membres du Collège de France, montre que 75 % des interviewés disent ne pas croire en Dieu, mais que 85 % d’entre eux pensent que l’on peut « concilier » science et croyance. Malheureusement, on ne leur a pas demandé ce qu’ils entendaient par « concilier ». On pourrait donner un sens très faible à ce mot en le réduisant à l’observation que beaucoup de grands scientifiques se sont déclarés croyants. Mais, comme le fait remarquer Richard Dawkins [2], il y a de moins en moins de grands scientifiques croyants. Et, pour ceux de l’époque de Galilée ou Newton, qui vivaient dans des sociétés où l’athéisme était fortement réprimé, on doit se poser la question de leur sincérité ou, du moins, de savoir dans quelle mesure ils ne faisaient pas de nécessité vertu. Darwin, qui vivait à une époque ultérieure, était sans doute athée, mais était bien trop respectueux des mœurs de son temps (et des opinions de sa femme) pour en faire état publiquement. Néanmoins, comme on le verra plus loin, la question cruciale est de savoir ce que les savants croyants veulent dire exactement quand ils disent « croire en Dieu ».

On pourrait cependant donner un sens plus fort au terme « concilier », à savoir que l’on peut rationnellement être à la fois scientifique et croyant. Et, bien que ce sondage soit incomplet et pas très représentatif, il est probable qu’il reflète l’opinion dominante de beaucoup de scientifiques et d’incroyants : nous, personnellement, ne croyons pas ou nous « n’avons pas la foi », mais il n’y a, par ailleurs, aucune opposition entre science et religion. Il existe de multiples façons d’exprimer cette idée :

  • La science répond à la question du « comment ? » mais pas du « pourquoi ? »
  • La science ne répond pas à la question du sens.
  • La science s’occupe de questions de fait, la religion de questions de valeur. Ce sont des « registres » différents.
  • La religion s’occupe de questions « ultimes ».

La plupart des religieux « modernes », surtout parmi les chrétiens, tiennent le même genre de discours : ils ne pensent nullement contester la théorie de l’évolution ou toute autre théorie scientifique et voient la religion comme totalement indépendante de la science et par conséquent, conciliable avec elle. Ce consensus peut paraître étrange car, après tout, pendant des siècles, il y a bien eu un combat entre science et religion (voir Science et Religion de Bertrand Russel [3] pour une description détaillée) ; pourquoi ce combat se serait-il terminé ? Est-ce la science qui a changé ? Ou la religion ? Ou les deux ? Pour tenter de répondre à ces questions, il faut d’abord examiner les différents sens que peut avoir la croyance religieuse.

Que veut dire « croire en Dieu » ?

Il existe en fait différentes sortes de croyances religieuses qu’on pourrait résumer en parlant de différents « Dieux » : le Dieu-superstition, le Dieu-métaphysique et le Dieu-garant-de-la-morale ; avant d’expliciter ces notions, soulignons que l’expression « Dieu » est utilisée ici pour parler de façon condensée « d’une forme de Dieu auquel certaines personnes croient » et qu’on utilise le mot Dieu au singulier, pour la facilité, mais que les croyances auxquelles cette expression renvoie sont très variées.

Lorsque l’on visite un temple en Inde, on y voit un grand nombre de gens, souvent très pauvres, qui font des offrandes ou se prosternent devant ce que les chrétiens et les musulmans appellent des idoles, c’est-à-dire des statues de pierre représentant différentes divinités. Si l’on questionne ces personnes sur leurs motivations, il est peu probable qu’elles répondent qu’elles « ont la foi » ou qu’elles « ont fait le choix » de vivre ainsi. Elles ne se posent sans doute pas de questions, mais elles « savent », ou plus exactement elles croient savoir, que ces cultes ont des effets bénéfiques dans leur vie et que les négliger risque d’avoir des conséquences négatives. Leur poser la question des raisons de leurs croyances semblerait aussi saugrenu à leurs yeux que nous paraîtrait à nous la question de savoir pourquoi nous « croyons » que la bataille de Waterloo a eu lieu en 1815 ou que Tokyo est la capitale du Japon. Ce sont des faits bien connus dirions-nous, et eux répondraient sans doute la même chose.

Dieu-superstition

Cela illustre l’idée du Dieu-superstition qui est, avant tout, une sorte de personne humaine, ayant comme nous des désirs et des caprices, mais invisible et dotée de pouvoirs surnaturels. C’est quelqu’un qui répond à nos prières, accomplit des miracles et nous punit si l’on manque de respect à son égard. Contrairement à ce que voudraient croire les théologiens et les intellectuels chrétiens ou musulmans, qui aspirent à une religion « pure », non superstitieuse, ce Dieu-superstition est probablement le véritable Dieu de l’immense majorité des croyants, le Dieu qui intéresse réellement la plupart des êtres humains, parce que ceux-ci se préoccupent avant tout de leur bien-être, de leur santé, de la réussite de leurs enfants et que ce Dieu-superstition est supposé les aider sur ce plan-là, dans la vie ici-bas, non dans l’au-delà. C’est le Dieu-superstition que l’on invoque pour guérir d’une maladie, pour éviter des intempéries ou des catastrophes naturelles, ou encore pour « avoir la force » de surmonter diverses épreuves. C’est aussi le Dieu du « Gott mit uns », le Dieu qui « bénit l’Amérique » ou, plus prosaïquement, celui auquel pensent les joueurs de football qui font le signe de croix en montant sur le terrain.

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Le Dieu-superstition est analogue à la croyance aux esprits, à l’animisme ou au polythéisme, mais, malgré les dénégations de leurs représentants officiels, il est extrêmement présent dans les religions nominalement monothéistes ; pensons simplement aux images de saints, aux pèlerinages, aux bougies dans les églises, etc. et au caractère massif et extraordinairement populaire de ce genre de phénomènes.

Pour illustrer le fait que les croyances religieuses modernes ne sont pas tellement plus rationnelles que l’animisme, l’anthropologue Pascal Boyer rapporte l’histoire d’un dîner à Cambridge, au cours duquel il expliquait que chez les Fang, un peuple gabonais, on croit que les sorciers ont un organe interne qui s’envole la nuit pour détruire les récoltes des gens et qu’ils organisent des festins pendant lesquels ils dévorent leurs victimes. Un théologien catholique présent lui dit que ce qui rendait l’anthropologie passionnante, c’était d’essayer de comprendre comment les gens pouvaient croire de telles inepties. Pascal Boyer fut trop poli pour lui répondre, mais il se dit que les Fang n’en reviendraient pas si on leur expliquait que « trois personnes étaient en réalité une seule personne tout en étant trois personnes, ou que tous nos malheurs dans cette vallée de larmes sont dus à deux ancêtres qui ont voulu goûter à un fruit exotique dans un jardin » [4].

Le théologien lui aurait sans doute répondu que les croyances catholiques, dans leur aspect superstitieux, ne doivent pas être prises au pied de la lettre. Mais si l’on « retirait » les superstitions des religions monothéistes comme le souhaitent certains théologiens et intellectuels, ces religions ne conserveraient que peu d’adeptes. En fait, ces théologiens et intellectuels sont tout aussi athées que les athées déclarés par rapport au Dieu-superstition, c’est-à-dire par rapport à celui qui compte réellement pour l’immense majorité des croyants.

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La sécularisation de nos sociétés n’a pas fait réellement disparaître le Dieu-superstition, elle l’a en partie déplacé vers les superstitions usuelles : l’astrologie ou les médecines parallèles. On peut même voir la psychanalyse, qui est sans doute, à l’heure actuelle, en France, la plus intellectuelle des superstitions, comme une forme d’animisme : l’inconscient freudien fonctionnant comme une sorte d’esprit ayant, tout comme notre esprit, des désirs et des aspirations. Bien sûr, cet inconscient ne répond pas à nos prières, mais il existe une sorte de prêtres, les psychanalystes, qui sont supposés y avoir accès et sont, parfois, capables de le manipuler.

Le Dieu-superstition entre manifestement en conflit avec la science moderne, comme toutes les superstitions. Des assertions faites à propos de miracles ou de l’efficacité de la prière sont parfaitement testables, au moins autant que les assertions de l’astrologie ou des médecines parallèles. Les tests réalisés jusqu’à présent sont négatifs (voir Dawkins, Pour en finir avec Dieu [2])   1 .

Un autre problème du Dieu-superstition, c’est sa multiplicité. Toutes les cultures ont ce genre de croyances et il est difficile d’imaginer qu’elles soient toutes vraies ; cela justifierait un degré de polythéisme difficile à accepter. Mais, dans toutes les cultures, on trouvera des témoignages sur l’efficacité des prières et la présence de miracles ; si les chrétiens et les musulmans n’accordent que peu de foi aux miracles, mettons, de la religion hindoue, pourquoi accorder foi à leurs prodiges ?

Une façon d’essayer de sortir du problème de la multiplicité des croyances, c’est d’introduire le Dieu-métaphysique ; celui-ci est le créateur de l’Univers, le fondement de l’Être, le premier moteur, le principe fondamental du Tout. C’est peut-être l’Inconnu suprême, le Dieu négatif, le « quelque chose qui nous dépasse », le mystère absolu. C’est le Dieu dont St Thomas, St Anselme, Descartes ou Gödel ont tenté de prouver l’existence. C’est le Grand Architecte de l’Univers. C’est le Dieu des déistes et celui sur l’existence duquel les agnostiques refusent de se prononcer. Pour certains, le Dieu-métaphysique peut même se réduire à la Nature ou à ses Lois, auquel cas l’épithète métaphysique devient discutable.

Dieu-métaphysique

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Quand Bertrand Russell fut mis en prison pendant la première guerre mondiale pour son opposition à la guerre, le gardien lui demanda quelle était sa religion. Il répondit « agnostique » et le gardien, perplexe lui dit : « je pense que cela va, nous croyons tous dans le même Dieu ». C’était de nouveau du Dieu-métaphysique qu’il s’agissait, Russell n’étant sûrement pas agnostique par rapport au Dieu-superstition. Le Dieu-métaphysique est le seul qui peut être le « même » pour tout le monde, parce qu’il ne possède aucune propriété précise, contrairement au Dieu-superstition, dont les propriétés varient d’une culture à l’autre.

C’est sur le Dieu-métaphysique que se concentrent les discussions sur l’athéisme, l’agnosticisme ou les relations entre science et foi. La bonne posture n’est pas de nier l’existence du Dieu-métaphysique (comme on doit le faire avec le Dieu-superstition) mais de rejeter la question comme étant dénuée de sens et d’intérêt. En effet, que savons-nous de Lui, rien, strictement rien – et c’est bien pour cela qu’il est raisonnable de le mettre de côté. Ce qui intéresse réellement les êtres humains, c’est un Dieu qui s’ingère dans nos affaires, en nous aidant ou en punissant les « méchants ».

Mais comment peut-on imaginer que le Dieu-métaphysique se préoccupe le moins du monde de savoir si Ahmed ou Jacob mangent du porc, si Fatima a un voile qui cache ses cheveux, ou si Jacques va à la messe tous les dimanches ? Ce Dieu-là se préoccupe-t-il de savoir qui gagne une guerre ou un match de football ? Se soucie-t-il même de cette petite créature s’agitant sur une planète perdue dans l’Univers et qu’on appelle l’Homme ?

Quand on dit que certains scientifiques célèbres sont croyants, on parle presque toujours de la croyance en un Dieu-métaphysique, pas en un Dieu-superstition. Et quand les membres du Collège de France disent que science et croyance sont compatibles, ils pensent sans doute à la croyance dans le Dieu-métaphysique, pas dans le Dieu-superstition, qui est évidemment incompatible avec la science.

Le Dieu-métaphysique est néanmoins incompatible avec l’esprit de la science, précisément parce qu’il est métaphysique, c’est-à-dire inconnaissable et qu’aucune hypothèse faite à son sujet ne peut être testée.

Le Dieu-métaphysique est aussi le Dieu du « principe anthropique », qui

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affirme que diverses constantes physiques ont dû être soigneusement « choisies » pour que la vie ait pu exister dans l’Univers et celui du « dessein intelligent » qui considère que la sélection naturelle ne peut, à elle seule, expliquer l’évolution de la vie. C’est le Dieu dont on parle quand on dit que la science mène à Dieu, ou que l’on veut aller « au-delà » de la science, tout en prétendant rester dans sa logique, en invoquant la théorie du chaos, la mécanique quantique ou le théorème de Gödel. Mais ces Dieux ne font que remplir artificiellement les trous (bien réels) dans nos connaissances. Comme personne ne peut inférer la moindre propriété concrète du dessein intelligent ou de ce qui serait derrière le principe anthropique, à part le fait qu’ils ont exactement les propriétés nécessaires pour que le monde soit ce qu’il est, les invoquer revient à dire « on ne sait pas ».

La différence entre les athées et les agnostiques porte presque toujours sur le Dieu métaphysique – les agnostiques pensent souvent que l’athéisme consiste à affirmer avec certitude l’inexistence du Dieu métaphysique, ce qui est effectivement, presque par définition, impossible. Si, par contre, on définit l’athéisme comme le rejet du Dieu-superstition et comme l’indifférence à l’égard de l’inconnaissable Dieu-métaphysique, alors la différence avec l’agnosticisme devient difficile à définir.

La seule façon de faire un lien entre le Dieu-superstition et le Dieu-métaphysique est à travers la révélation ou l’envoi d’un « messager ». Dans la révélation, le Dieu tout puissant, créateur de l’Univers, de toutes les choses visibles et invisibles, etc. explique aux hommes ce qu’il attend d’eux, comment le respecter et comment obtenir certains avantages. Tout cela est en général expliqué dans un Livre.

Mais la révélation rencontre un problème similaire à celui de la superstition : laquelle choisir ? Même en se restreignant aux religions du Livre, on a l’embarras du choix, non seulement entre judaïsme, christianisme et islam, mais entre toutes les variantes à l’intérieur de ces différentes religions. Même à l’intérieur d’une variante donnée, mettons le catholicisme, où il existe une hiérarchie qui garantit en principe l’homogénéité idéologique, on trouve un grand nombre d’interprétations divergentes.

Évidemment, chaque religion ou chaque secte a sa propre apologétique, tendant à démontrer que son interprétation de son livre sacré est la « bonne ». Ce qu’il importe de souligner, c’est que chaque interprétation se justifie au moyen de critères qui sont, en fin de compte, purement humains. Les chrétiens diront que leur religion est plus compatible avec la démocratie, la laïcité ou le féminisme que l’islam. Les chrétiens de gauche ou les théologiens de la libération diront que leur version du christianisme est plus proche des pauvres. Les musulmans rétorqueront que leur religion est plus purement monothéiste, etc.

Mais comment savoir ce que le Dieu-métaphysique est ou veut vraiment ? Comment savoir s’il ne souhaite pas un ordre social injuste (à nos yeux), la soumission des femmes ou la dictature ? Comment même savoir s’il est unique et pas multiple ? Comment même imaginer un argument qui permette de départager les différentes religions ou interprétations de ce point de vue-là et non d’un point de vue purement humain ? On ne peut pas aller demander au Dieu métaphysique ce qu’il a vraiment voulu dire, parce que tout ce dont on dispose, c’est un certain nombre de textes, contradictoires entre eux, ouverts à une multitude d’interprétations, également contradictoires entre elles et nous n’avons accès à strictement rien d’autre.

L’autre problème lié aux révélations, c’est que les livres sacrés contiennent presque tous des textes indéfendables aujourd’hui, soit pour des raisons morales, soit à cause de développements scientifiques. La réponse des croyants est, en général, qu’il faut situer ces écrits dans le contexte de leur époque et tenir compte du fait qu’ils ont été produits par des êtres humains faillibles et imparfaits. Mais, à nouveau, comment séparer ce qui est humain de ce qui est vraiment révélé ? Qui sommes-nous pour traduire ce que Dieu a vraiment voulu dire ? L’attitude littéraliste, même si elle force ses adhérents à avaler un bon nombre de couleuvres, a au moins l’avantage de la cohérence.

Dieu-garant-de-la-morale

Finalement, il y a le Dieu-garant-de-la-morale. Le Dieu-superstition est en partie garant de la morale, dans la mesure où il nous récompense et nous punit dans ce monde-ci pour nos actions.

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Mais comme manifestement les infortunes de la vertu et les prospérités du vice abondent dans le monde ici-bas, il faut nécessairement introduire l’idée d’une vie après la mort pour que justice soit faite. Et c’est cette idée qui pose le plus de problèmes. Elle est d’une certaine façon métaphysique, parce que non testable, tout en étant superstitieuse et en réalité incompréhensible : ce qui est supposé survivre à la mort physique, c’est d’une certaine façon notre esprit. Mais sous quelle forme ? Si quelqu’un meurt en état d’inconscience, est-ce que son esprit survit inconscient pour l’éternité ? Si non, sous quelle forme survit-il ? Revient-on à un âge antérieur à celui de notre mort et si oui, lequel ?

De nouveau, les théologiens apportent sans doute des réponses multiples à ces questions, mais sans jamais avoir le moyen de déterminer, même en principe, quelle est la bonne, parce qu’il n’y a aucun moyen d’interroger le Dieu-métaphysique sur le sort qu’il nous réserve dans l’au-delà.

En fin de compte, toutes les variantes de la « croyance en Dieu » sont bel et bien incompatibles avec la science, ou du moins avec son esprit.

Considérations pratiques

C’est le Dieu-garant-de-la-morale qui, d’un point de vue pratique, est le plus important de tous, parce que c’est lui qui fait en sorte que la religion ait un impact politique. Le Dieu-superstition fait beaucoup de tort, parce qu’il mène à préférer les mauvaises thérapies aux bonnes et en général, mène à des choix pratiques inefficaces, mais pas plus que les superstitions, puisqu’il est de même nature que celles-ci. Le Dieu-métaphysique, à lui seul, ne fait aucun tort si ce n’est d’obscurcir la pensée humaine, comme le fait en général la métaphysique, mais c’est sans doute un mal dont les effets sont limités.

Quels sont les effets du Dieu-garant-de-la-morale ? Diderot distinguait dans les « livres inspirés » (c’est-à-dire révélés) deux morales : « l’une, générale et commune à toutes les Nations, à tous les cultes et qu’on suit à peu près ; une autre, propre à chaque nation et à chaque culte, à laquelle on croit, qu’on prêche dans les temples, qu’on préconise dans les maisons, et qu’on ne suit point du tout » [5]. Quand Diderot dit qu’on ne suit « point du tout » la morale spécifique à chaque culte, il pense sans doute au christianisme décadent de son époque, mais il est évident qu’à d’autres époques et en d’autres lieux, les règles vestimentaires, culinaires ou sexuelles particulières à chaque religion, sont très suivies. Et, pour ce qui est de la « morale commune », ce concept est sans doute plus difficile à préciser que Diderot ne le pensait ; cependant, quand les gens abandonnent leurs croyances religieuses, ils abandonnent aussi certaines pratiques, celles liées spécifiquement à leur religion, mais ils ne se mettent pas, en règle générale, à tuer ou à voler leurs voisins, c’est-à-dire qu’ils continuent à respecter une morale commune et humaine.

Notons qu’un des principaux arguments des religieux est que seule la religion permet de garder les gens « dans le droit chemin » et de leur faire respecter justement cette morale commune. Cette idée est extrêmement répandue, y compris parmi beaucoup d’incroyants. Néanmoins, certaines études empiriques montrent une corrélation assez forte dans les pays développés entre croyance en Dieu et certains maux sociaux tels que les homicides, la mortalité juvénile, les maladies vénériennes, les adolescentes enceintes et même l’avortement [6]. Bien sûr, on ne peut pas tirer de cette corrélation un lien de cause à effet (il est probable que ces maux sociaux et la croyance religieuse aient des causes communes, par exemple l’inégalité sociale – voir [7]), mais cela montre que l’existence d’un lien causal inverse, entre absence de croyance religieuse et immoralité, que beaucoup de religieux soutiennent, est loin d’être démontrée. De toute façon, même si cet argument utilitariste en faveur de la religion (comme moyen de faire respecter la morale) était vrai, il ne nous dirait rien sur la question de savoir si celle-ci est vraie ou fausse.

Il y a un troisième impact moral de la religion, ce qu’on pourrait appeler l’encouragement au fanatisme, c’est-à-dire à des actions qui vont à l’encontre de la morale commune, tuer des innocents par exemple, ou imposer les morales particulières à une religion donnée à l’ensemble de la société. Le fanatisme est presque toujours lié à la croyance dans l’au-delà. En effet, si la vie ici-bas n’est qu’une préparation à la vie éternelle dans l’au-delà, pourquoi se soucier d’autres commandements que les commandements divins ou supposés tels ?

Évidemment, beaucoup de chrétiens modernes, libéraux ou « progressistes », ont laissé tomber les aspects fanatiques de leur religion, ainsi que l’interprétation littérale des textes sacrés. Ils mettent de côté l’idée du ciel et de l’enfer (en tout cas, de l’enfer) et se replient de plus en plus sur le Dieu métaphysique. À la limite, la question de savoir si ce qu’ils disent est vrai ou faux ne les intéresse pas. Ce qui compte, ce sont les « choix personnels » que l’on fait ou « se sentir bien ». Mais la question qu’on est en droit de leur poser est « que peut bien encore signifier votre religion ? » Lorsqu’ils parlent, comme ils le font souvent, de « donner du sens » ou de « l’espérance », qu’est-ce que cela veut dire si on ne croit pas à la vie éternelle ? Et si on y croit, pourquoi ne pas la prendre au sérieux et passer la vie ici-bas à s’y préparer en suivant à la lettre les prescriptions divines ?

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Le christianisme moderne est devenu tellement vide de contenu qu’il peut paraître inoffensif, et il l’est effectivement, si l’on met de côté la confusion intellectuelle qu’il engendre. Il a néanmoins des effets pervers : il amène bon nombre d’incroyants et de laïcs en Europe, à le prendre pour le paradigme de ce qu’est une religion. Ceci entraîne l’abandon progressif de la critique rationaliste de la religion, vue comme dépassée, étant donné le côté « inoffensif » du christianisme moderne. Une des raisons pour lesquelles beaucoup de laïcs et de scientifiques acceptent l’idée de la compatibilité entre science et foi, c’est que, présentée sous la forme du christianisme moderne, la foi ne veut plus rien dire (ou presque). Mais d’un point de vue géographique et historique, le christianisme moderne est une aberration dans l’ensemble de croyances religieuses qui sont, pour la plupart, littéralistes.

De plus, cela amène beaucoup d’incroyants à exiger des autres religions, l’islam ici ou le christianisme fondamentaliste aux États-Unis, qu’elles « s’adaptent » ou se « modernisent », pour ressembler au christianisme moderne. Mais c’est oublier que celui-ci est le résultat de siècles de combat rationaliste contre la religion, la croyance, et l’irrationnel en général. Les chrétiens modernes ne le sont pas devenus parce qu’on leur a dit d’être laïcs ou d’être gentils avec les femmes, les homosexuels ou les incroyants, mais parce que la solidité de leurs croyances a été petit à petit sapée par la critique scientifique et rationaliste. Le christianisme moderne est en grande partie une réaction d’adaptation face à la défaite intellectuelle du christianisme traditionnel.

La critique des religions qui sont considérées comme nocives (en Europe, essentiellement, l’islam) est aujourd’hui presque exclusivement une critique morale , se concentrant sur les aspects « barbares » de certaines pratiques particulières, sur le fondamentalisme au niveau dogmatique, ou sur le fanatisme. Mais c’est sous-estimer le fait que la critique purement morale de la religion est sans effet, parce que ce qui semble fanatique aux incroyants est parfaitement rationnel pour les croyants, du moins pour ceux qui prennent au sérieux l’idée de la vie éternelle et du ciel et de l’enfer. Si on accepte ces prémisses (sur le ciel et l’enfer) il serait totalement absurde de risquer d’aller en enfer pour se conformer à de simples prescriptions humaines. Pour changer les comportements, il faudrait d’abord ébranler les croyances et, pour cela, revenir à une critique rationaliste et non purement morale de la religion.

Un autre problème rencontré par la critique morale de la religion est que les religieux ripostent en soulignant le côté immoral de nombreux courants athées ou supposés tels ; au choix : nazisme, communisme, colonialisme, ou consumérisme destructeur de l’environnement. D’un côté, on hurle en parlant de l’Inquisition ou des Croisades et de l’autre, on répond avec Hitler et Staline. Si les incroyants disent que les idées de ces derniers constituent en réalité une forme de croyance quasi-religieuse, les croyants répondront que la violence faite au nom de la religion est une déformation du « véritable » message religieux. On ne s’en sort pas, tant qu’on ne pose pas la question de la vérité  : le discours religieux est-il vrai ou faux ? Imaginons un instant que Dieu existe vraiment et qu’il aime, mettons les Croisades, l’Inquisition ou le régime féodal, comme on l’imaginait au Moyen-Âge. Il enverrait par conséquent en enfer tous ceux, y compris les chrétiens modernes, qui s’opposent à ces pratiques. Quelle objection pourrait-on bien soulever dans ce cas à ces pratiques que nous condamnons comme moyenâgeuses ? Bien sûr, presque plus personne ne croit dans ce genre de Dieu, mais justement, cela veut dire qu’on ne croit plus que ce type de discours religieux soit vrai . Et cela montre que même le discours chrétien moderne qui tente de mettre de côté la question de la vérité ou de la fausseté de la religion, présuppose que certaines choses auxquelles les croyants ont adhéré pendant des siècles sont, en réalité, fausses.

Le christianisme moderne fonctionne comme une sorte de ruse de la déraison qui amène les incroyants à ne plus comprendre la logique de la religion, à abandonner la critique rationaliste de celle-ci et à la combattre lorsqu’ils considèrent ce combat nécessaire, à travers un discours purement moralisateur dont on peut sérieusement craindre qu’il ne soit totalement inefficace.

1 | Le Point , n° 1977, 5 août 2010, p. 44. 2 | Richard Dawkins, Pour en finir avec Dieu , (trad. M-F Desjeux-Lefort) Librairie Académique Perrin, Paris, 2009. 3 | Bertrand Russell, (trad. Philippe-Roger Mantoux), Science et religion , Gallimard, Paris, 1990. 4 | Pascal Boyer, Et l’homme créa les dieux , Robert Laffont, Paris 2001, p. 293. 5 | Denis Diderot, Pour une morale de l’athéisme. Entretien d’un philosophe avec la maréchale de *** . Mille et une nuits, Paris, 2007, p. 24. 6 | Gregory S. Paul, « Cross-National Correlations of Quantifiable Societal Health with Popular Religiosity and Secularism in the Prosperous Democracies : A First Look » , Journal of Religion & Society 7 (2005). 7 | Sur le lien entre inégalité et maux sociaux, voir Richard Wilkinson, Kate Pickett, The Spirit Level. Why Equality is Better for Everyone , Penguin Books, Londres, 2010.

1  Les premières études statistiques sur l’(in)efficacité de la prière remontent au moins à Francis Galton, « Statistical Enquiries into the Efficacy of Prayers », The Fortnightly Review, n° 12, août 1872, p. 125-135.

Thème : Science et religion

Mots-clés : Religion

Publié dans le n° 314 de la revue

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dissertation la science et la religion sont elles compatibles

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Jean Bricmont est physicien et essayiste belge, professeur émérite de physique théorique à l’université catholique (…)

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Dissertation : la foi et la raison sont-elles compatibles ?

La question de la compatibilité entre la foi et la raison est un sujet de débat qui suscite de nombreuses réflexions : introduction à ces notions de philosophie

Dissertation : la foi et la raison sont-elles compatibles ?

Credit Photo : Descartes la foi et la raison - Youtube @Le_Precepteur

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Introduction

Les croyants affirment que la foi est nécessaire pour comprendre certaines vérités, tandis que les rationalistes soutiennent que la raison est suffisante pour comprendre la réalité. Dans cette dissertation, nous allons explorer les arguments des deux côtés de ce débat en citant les grands penseurs pour appuyer notre argumentation et déterminer si la foi et la raison sont compatibles ou non.

I. Les arguments en faveur de la compatibilité entre la foi et la raison A. La foi peut compléter la raison B. La foi peut être fondée sur des preuves raisonnables C. La foi et la raison peuvent coexister harmonieusement

II. Les arguments contre la compatibilité entre la foi et la raison A. La foi peut contredire la raison B. La foi peut encourager l'irrationalité C. La foi et la raison peuvent être mutuellement exclusives

III. Conclusion A. Synthèse des arguments en faveur et contre la compatibilité entre la foi et la raison B. Références des grands penseurs pour appuyer l'argumentation.

  • La foi et la raison sont-elles compatibles ?
  • Foi et raison

I.    Les arguments en faveur de la compatibilité entre la foi et la raison

Selon Descartes, la raison peut nous aider à comprendre les aspects matériels de l'existence, mais elle ne peut pas répondre à toutes les questions existentielles. La foi, en revanche, peut compléter la raison en apportant des réponses à des questions telles que l'origine de l'univers et le sens de la vie. Cette idée de complémentarité est également soutenue par d'autres penseurs tels que Leibniz qui affirme que la foi et la raison sont des moyens différents d'accéder à la vérité, mais qu'ils ne sont pas mutuellement exclusifs. Ainsi, la foi peut nous apporter une dimension spirituelle et éthique qui est complémentaire à la dimension rationnelle de la raison. B. La foi peut être fondée sur des preuves raisonnables

Selon Spinoza, la foi peut être fondée sur des preuves raisonnables telles que les arguments philosophiques et les témoignages de personnes ayant eu des expériences religieuses. Cette idée est également soutenue par d'autres penseurs tels que Kant qui affirme que la foi doit être fondée sur des raisons et des preuves, plutôt que sur la simple croyance aveugle. Ainsi, la foi peut être justifiée par des arguments rationnels et des preuves tangibles, ce qui la rend compatible avec la raison.

C.  La foi et la raison peuvent coexister harmonieusement

Selon Pascal, la foi et la raison peuvent coexister harmonieusement en se complétant mutuellement. Il affirme que la foi permet d'accéder à des vérités qui dépassent les capacités de la raison, tandis que la raison permet de comprendre les vérités accessibles par la foi. Ainsi, la foi et la raison peuvent s'enrichir mutuellement pour nous permettre d'accéder à une vérité plus complète.

II.    Les arguments contre la compatibilité entre la foi et la raison

A. La foi peut contredire la raison

Selon Voltaire, la foi peut contredire la raison en présentant des croyances qui sont en contradiction avec les conclusions scientifiques établies. Par exemple, la théorie de l'évolution contredirait l'affirmation selon laquelle tous les êtres vivants ont été créés par un dieu. Cette idée est également partagée par d'autres penseurs tels que Jean-Paul Sartre qui affirme que la foi peut limiter notre capacité à utiliser la raison de manière critique et libre.

B. La foi peut encourager l'irrationalité

Selon ces mêmes penseurs, la foi peut également encourager l'irrationalité en nous incitant à accepter des croyances ou des pratiques qui ne sont pas étayées par des preuves raisonnables. Ainsi, la foi peut nous amener à rejeter les conclusions scientifiques établies et à accepter des idées qui sont basées sur la superstition ou la croyance aveugle. Cela peut également entraîner un manque de réflexion critique et de libre-arbitre, ce qui peut être nuisible pour notre développement personnel et social.

III.    Conclusion

A. Synthèse des arguments en faveur et contre la compatibilité entre la foi et la raison

Il est clair que les arguments pour et contre la compatibilité entre la foi et la raison ont des points de vue différents. Les arguments en faveur de la compatibilité soutiennent que la foi peut compléter la raison, être fondée sur des preuves raisonnables et coexister harmonieusement avec la raison. Les arguments contre la compatibilité soutiennent que la foi peut contredire la raison et encourager l'irrationalité.

B. Références des grands penseurs pour appuyer l'argumentation

Descartes, Leibniz, Spinoza, Kant, Pascal, Voltaire, Jean-Paul Sartre.

En conclusion, la question de la compatibilité entre la foi et la raison est complexe et complexe, les différents points de vue des grands penseurs montrent qu'il n'y a pas de réponse unique à cette question. Il est important de maintenir un équilibre entre la foi et la raison pour pouvoir accéder à une vérité plus complète. Il est donc important de considérer les arguments des deux côtés de ce débat pour pouvoir arriver à une conclusion personnelle sur la question. Il est également important de ne pas rejeter complètement l'une ou l'autre, car il est possible de trouver une certaine forme de complémentarité entre la foi et la raison. Il est donc important de maintenir un esprit ouvert et de continuer à explorer cette question complexe pour arriver à une compréhension plus profonde de notre monde et de notre place dans celui-ci.

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Classement des écoles » Dissertations et devoirs » Philosophie » Dissertation : La science peut-elle faire disparaître la religion ?

Dissertation : La science peut-elle faire disparaître la religion ?

France métropolitaine • Septembre 2011

dissertation • Série L

La science peut-elle faire disparaître la religion ?

Les clés du sujet

Définir les termes du sujet

Au sens large, le mot désigne un savoir. De façon plus précise, c’est un savoir fondé, démontré , qui ne varie donc pas avec les circonstances. Science s’oppose ainsi à opinion. La connaissance scientifique moderne implique l’idée d’ expérimentation .

La religion

C’est une pratique collective structurée par des rites, des cultes, par lesquels une communauté de croyants affirme être liée à un ou plusieurs dieux garants de l’ordre et de la justice. Sur le plan subjectif, chaque membre du groupe est animé par une foi dans l’existence et la bienfaisance de ces divinités.

Faire disparaître

Cette expression sous-entend la présence d’un processus . La science est-elle une démarche conquérante qui, dans son parcours, chasse la religion des domaines qu’elle occupait ?

Le verbe pouvoir

Il a ici d’abord le sens de la possibilité  : la science a-t-elle les moyens de provoquer la disparition de la religion ? Un deuxième sens, celui de la légitimité , apparaîtra aussi.

Dégager la problématique et construire un plan

La problématique.

Science et religion ont eu, et ont encore parfois, des relations conflictuelles comme si toute avancée de la première signifiait un recul de la seconde. Il faut donc qu’elles aient une prétention commune . Quelle est-elle et devons-nous penser que leurs relations soient telles que les avancées de l’une chassent l’autre ?

Dans un premier temps, nous verrons les présupposés expliquant l’existence d’un conflit. Puis, nous aborderons les grands thèmes de la critique de la religion . Enfin, nous nous demanderons si la prétention scientifique à faire disparaître la religion ne révèle pas une méconnaissance par la science des limites de son domaine.

Éviter les erreurs

Faire une copie simplificatrice en faveur d’une des deux notions.

Les titres en couleurs servent à guider la lecture et ne doivent en aucun cas figurer sur la copie.

Introduction

Il est courant d’entendre opposer la science et la religion. Nous avons le sentiment que chaque avancée de l’explication scientifique se traduit par un recul des croyances religieuses. Des raisons existent à cela. L’Europe a été marquée par des conflits retentissants entre ces deux modes de pensée, comme en témoigne la condamnation de Galilée, et l’époque des Lumières a estimé que la religion était une superstition qui disparaîtrait avec les progrès des sciences de la nature.

Cependant, il est clair qu’aujourd’hui, le développement de la connaissance scientifique n’a pas supprimé la pensée religieuse. N’est-ce qu’une question de temps ou doit-on penser que la religion est un phénomène plus complexe ou plus étendu que la représentation que les Lumières s’en faisaient ?

1. Présupposés du sujet

A. démarche scientifique et attitude religieuse.

Les Grecs entendent par science un exercice du raisonnement dont la démonstration est la plus haute manifestation. La raison procède en suivant des règles de logique dont la fixité et l’impersonnalité tranchent avec l’inconstance des opinions courantes. Le géomètre, le mathématicien découvrent les propriétés immuables des figures et des nombres. Ils cherchent la connaissance des choses, alors que les opinions sont des jugements partiels et intéressés. La science est de l’ordre de la théorie , alors que la religion possède dès l’origine une dimension pratique que Durkheim a fortement soulignée. La religion est un « système solidaire de croyances et de pratiques », distinguant le sacré du profane et capable d’unir des individus dans une communauté dont ils se sentent les membres. Cette dimension sociale est importante au point que Bergson a pu écrire qu’il n’y a jamais eu de société sans religion alors que la science et la philosophie n’ont pas toujours existé. Les liens unissant des fidèles entre eux, par la médiation d’un lien commun à une autorité sacrée, ont un pouvoir de structuration, ils sont une sorte de ciment social. La religion apparaît donc comme une pensée globalisante.

B. Une question de domaine

La différence entre théorie et pratique ne suffit cependant pas à dire pourquoi la science pourrait faire disparaître la religion. Envisager ce phénomène implique que la première intervienne de façon offensive sur le terrain où la seconde la précédait. Deux questions se posent alors. Quel est ce domaine ? Quelles sont les caractéristiques de ces deux modes de pensée ? La réponse à la première question nous est donnée par l’Histoire. Il est indéniable que la science est entrée en concurrence avec les récits religieux touchant la nature , son ordre et ses lois, et qu’elle a pris parfois position dans les débats touchant la formation ou l’origine du monde . Dès lors, elle prenait une dimension métaphysique et elle mettait en cause les représentations religieuses, selon lesquelles l’ordre de l’univers ne pourrait venir que de l’action de puissances divines dont l’intelligence est à reconnaître dans les phénomènes qui nous entourent et dont la sagesse est à honorer dans des cultes.

[Transition] Ce point permet de saisir la racine du conflit dont le sujet fait état.

2. Les raisons du conflit

A. la séparation du mythe et de la raison.

Il est frappant d’apprendre qu’Anaxagore, un grand astronome grec, fut accusé d’athéisme et emprisonné pour avoir dit que le soleil était une pierre brûlante. Cette affirmation ôtait à cet astre son caractère sacré et l’intégrait dans l’univers matériel où les hommes vivent quotidiennement. L’attitude scientifique se marque par la volonté de découvrir la vraie nature et les vraies causes des phénomènes . Le développement du discours rationnel s’est fait en critiquant les récits religieux, c’est-à-dire les mythes . Le mythe est une narration touchant la naissance et le développement de l’ordre qui gouverne l’univers. Ses histoires mettent en jeu des divinités qui s’affrontent et accomplissent des exploits dans une dramaturgie dont le but est de célébrer la victoire de l’ordre sur les puissances de confusion. Or, les premiers physiciens présentent une pensée du cosmos en rupture avec cette façon de procéder. La science raisonne à partir de qualités abstraites comme « le froid », « le chaud », « le sec », « l’humide », et remplace les péripéties guerrières par des rapports mathématiques de proportionnalité. L’ordre est le résultat de relations équilibrées entre des couples d’opposés. Dès lors, le mythe devient synonyme de fable, donc de récit mensonger et absurde.

B. La dénonciation de la superstition religieuse

Ce premier coup porté aux prétentions explicatives de la religion ouvre la voie à sa définition comme une superstition . Spinoza considère que les cultes sont l’aboutissement de deux illusions qui s’enchaînent. L’ignorance native des hommes les pousse à imaginer être le centre de référence de la nature. La conscience de poursuivre des buts nous fait croire que tout ce qui nous entoure fait de même et, comme nous savons que nous ne sommes pas les auteurs des choses naturelles, nous croyons qu’elles ont été créées par des « directeurs de la nature » et nous leur rendons des hommages afin qu’ils nous soient favorables. À l’anthropocentrisme s’ajoute l’anthropomorphisme qui projette la forme et les passions humaines sur l’ensemble des phénomènes. Cette illusion s’explique par l’ignorance et par le désir de pouvoir agir sur notre milieu. La personnification des éléments naturels rend possible l’établissement d’une relation entre eux et nous. Spinoza trace ainsi le portrait de l’homme superstitieux, ignorant et angoissé, qui croit aux présages et honore des puissances supérieures pour satisfaire ses intérêts.

La science, en revanche, écarte l’idée des causes finales. Elle cherche à répondre à la question du «  comment  » et considère la nature comme un objet à étudier par le calcul et l’expérimentation. Max Weber parle de « désenchantement du monde » pour qualifier l’action de la raison scientifique à travers le temps. Les phénomènes s’expliquent par des lois et sans référence à nos désirs. À l’image d’un monde centré sur l’homme, « image de Dieu », la science physique substitue le concept d’un univers indifférent à nos souhaits et à nos craintes. Quant aux sciences naturelles, elles étudient l’histoire de notre espèce et la structure de son organisme sans y voir l’intention d’une intelligence supérieure.

[Transition] L’idée du désenchantement exprime bien le fait que les sciences ont fait reculer la religion, mais cela suffit-il à penser que leur progrès conduirait à la faire disparaître ?

3. Les limites de la science

A. la tentation scientiste.

La connaissance de la nature est devenue le domaine des sciences expérimentales, qui ne se bornent pas à décrire le réel mais l’interrogent en construisant des expérimentations de plus en plus précises, contrôlées et rendues possibles par un appareillage technique dont la sophistication ne cesse de croître. Le quantifiable, le reproductible sont les valeurs maîtresses de ces démarches. Aux récits généraux et symboliques, la science substitue la recherche de laboratoire où la théorie rend possible le développement de mesures pointues et leur expression dans une forme symbolique abstraite comme une équation. Une expérimentation n’est pas une simple observation de faits mais présuppose l’admission de plusieurs théories et la maîtrise d’un appareillage complexe.

Ces avancées ont pu faire croire que la science gouvernerait la totalité des affaires humaines. Le positivisme d’Auguste Comte en donne une expression très nette. Comte élabore la loi des trois états qui définit la période scientifique comme l’achèvement de deux âges antérieurs et imparfaits. Ainsi, l’humanité a commencé par une période théologique, dans laquelle l’ignorance des hommes les conduisit à croire en l’action de causes surnaturelles et cachées. Puis vint l’époque métaphysique, qui rationalisa ces fictions en parlant de causes premières et finales mais resta dans les erreurs de l’abstraction. Enfin, l’âge scientifique ou « positif » se libère de ces illusions pour n’étudier que les lois gouvernant les phénomènes, avec un esprit animé par le souci de la certitude et de la précision . Comte parle d’un progrès qui élimine les croyances dans une ou plusieurs divinités. La science dégage les lois de tous les phénomènes pour être la pensée universelle. On nomme cette prétention le scientisme .

B. Les deux ordres

On note toutefois que si la religion a quitté le terrain de la connaissance de la nature elle n’a pas disparu. Notre époque est même marquée par un retour du religieux. N’est-ce pas en raison de sa capacité à prendre en charge des angoisses auxquelles les sciences n’ont rien à dire ? Freud considère la religion comme une illusion, mais il reconnaît qu’elle réalise les « désirs les plus anciens, les plus forts, les plus pressants de l’humanité. » La détresse infantile suscite le désir de protection, la crainte de la mort et l’expérience des souffrances de la vie sont la cause d’un désir puissant de justice et de sens . L’absence de preuves ne nuit pas à la religion, elle prend sa source dans des sentiments liés à notre condition, non dans des démonstrations ou des expérimentations élaborées. Freud soutient que cette illusion ne peut décliner que si « notre dieu le logos » arrive à montrer à l’humanité qu’elle doit s’organiser par elle-même. Il nomme cela « l’éducation en vue de la réalité » et fait valoir l’extrême jeunesse de la pensée scientifique pour fonder sa croyance dans une disparition possible du phénomène religieux.

On peut toutefois se demander si Freud ne confond pas deux registres. La foi est une certitude subjective , issue d’une adhésion à un appel intérieurement ressenti. C’est une donation de sens qui se reçoit avant toute critique, quand la science cherche l’objectivité à travers la mise en place de procédures contrôlées. Il y a, comme le dit Pascal, deux ordres : « c’est le cœur qui sent Dieu et non la raison. Voilà ce qu’est la foi : Dieu sensible au cœur, non à la raison. » Les valeurs morales, l’interrogation sur la condition temporelle de l’homme, ne sont pas du ressort scientifique. La mort est pour le naturaliste un phénomène naturel et nécessaire, mais elle est pour chacun de nous une douleur quand nous perdons un proche. Dès lors comment la penser ? Est-ce un terme, un passage ? La liberté de la conscience est ici en jeu et elle est porteuse d’un droit qui n’est pas justiciable d’une approche scientifique.

Il est incontestable que les avancées multiples de la science dans le domaine de la connaissance de la nature ont fait reculer les récits religieux en les rabaissant au rang de mythes. Aujourd’hui, la religion ne cherche plus guère à rivaliser sur ce terrain, même si certains croyants rejettent encore Darwin. Elle reste toutefois présente sur les questions de choix moraux et constitue pour certains une réponse face à leur demande de sens. La spécificité de l’expérience de la foi la situe sur un autre plan que celui des expérimentations scientifiques, ce qui devrait empêcher les empiétements réciproques.

Dissertation : Interprète-t-on à défaut de connaître ?

Dissertation : percevoir, est-ce déjà connaître .

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« La vérité et la liberté sont-elles compatibles? »

Par mariesarah123   •  21 Mars 2021  •  Dissertation  •  1 412 Mots (6 Pages)  •  810 Vues

Dissertation

Depuis la nuit des temps, il est de mise de respecter certaines règles non écrites de savoir-vivre. Que ce soit par le respect des autres ou par la franchise, on dit que notre liberté personnelle s’arrête là où elle commence à brimer celle d’autrui. Notre liberté a un lien étroit avec la vérité, puisqu’il faut parfois la cacher ou la modifier ; ce qui brime involontairement notre liberté. Ces deux aspects se chevauchent constamment et cela m’amène à me poser la question suivante : « La vérité et la liberté sont-elles compatibles? ». D’un côté, la vérité n’est pas contraignante ; elle sert en fait à libérer et soulager l’esprit. Tous sont conscients que faire part de la vérité est plus éthique et respectueux. D’un autre côté, si la liberté représente de faire ce qu’on veut et dire tout ce que l’on pense, la vérité devient une entrave à notre liberté. Platon, la décrivant comme absence de contrainte, c’est en sens qu’elle est incompatible avec l’existence des lois et que l’excès de liberté peut devenir dangereux. Il est certainement difficile de parfois dire toute la vérité sans brimer une certaine liberté. Cela devient plus complexe de s’exprimer de manière totalement vraie, parfois crue, sans choquer ou nuire à la liberté d’autrui. Ainsi, il est logique de mettre une barrière aux vérités. Est-ce possible d’être libre tout en étant vrai? Il m’est difficile d’envisager un monde où la vérité n’empièterait jamais sur la liberté ou ne l’affecterait pas, et vice versa. D’une manière ou d’une autre, on ne peut être complètement libre et vrai simultanément, vu les contraintes que l’un amène à l’autre. Parménide voit la raison comme le critère de la vérité, ce qui en fait d’elle le concept le plus juste. Étant donc plus juste que la vérité, il serait logique de la prôner avant la liberté, et il est ainsi impossible qu’elles puissent cohabiter.   La vérité et la liberté sont-elles compatibles? est clairement une question philosophique puisqu’elle concerne tous les êtres humains et ne relève pas de l’observation, donc non de l’ordre de la science, mais bien de l’argumentation. Chacun peut y avoir un point de vue différent et l’argumenter à sa façon, et c’est ce qui lui rend son caractère philosophique. Cette question fait partie du domaine philosophique de la théorie de la connaissance, en raison de son côté où la réflexion et la référence à notre bagage personnel s’imposent. Il est intéressant d’aborder cette question puisqu’elle relève de la vérité et de la liberté ; deux grands thèmes controversés dans notre société actuelle auxquels de nombreuses questions sont encore sans réponses. Dans la suite de l’analyse, je décrierai ma pensée quant à la question La vérité et la liberté sont-elles compatibles? en y présentant ma thèse et une conceptualisation, mon principal argument, une objection possible et ma conclusion sur le sujet.

Dans un premier temps, je suis persuadée que la vérité et la liberté ne sont point compatibles. Afin d’éclaircir la question philosophique, voici la définition des concepts abordés dans celle-ci. Premièrement, la vérité se décrit comme une adéquation entre la réalité et l’homme qui la pense ou encore, comme une idée, une proposition qui emporte l’assentiment général ou s’accorde avec le sentiment que quelqu’un a de la réalité. Deuxièmement, la liberté est la possibilité et le pouvoir d’agir sans contrainte ou la situation de quelqu’un qui se détermine en dehors de toute pression extérieure ou de tout préjugé. Sartre la définit aussi comme se jeter dans le monde, de se perdre en lui pour tenter de le modifier, d’agir sur lui. Troisièmement, on définit la compatibilité comme le fait de s’accorder avec autre chose et exister en même temps dans une certaine conciliation et harmonie. Finalement, ma thèse quant à la question La vérité et la liberté sont-elles compatibles? est négative, puisque je crois qu’ils ne sont en aucun cas compatibles.

(Source des définitions : larousse.fr )

Je crois que la vérité et la liberté ne sont pas compatibles en raison de la retenue dont on doit faire preuve dans notre société actuelle. En effet, dans toutes les sphères de notre vie, tous se doivent d’avoir un certain filtre dans leurs actions et leurs paroles. Ceci étant dit, la vérité n’est parfois pas toujours divulguée ou assumée par crainte de faire preuve d’irrespect ou de blesser autrui, ou encore, par simple gêne ou inconfort. La liberté représente quant à elle le fait d’agir comme bon nous semble et de dire ce que l’on veut. Par conséquent, le fait de se retenir de partager certaines vérités ou de poser certains gestes, ne nous rend pas complètement libre, ce qui prouve l’incompatibilité de ces deux concepts. De plus, la liberté est tout aussi restreinte que la vérité. À la base, nous avons des règles et des principes à respecter qui nous empêchent un moment ou un autre d’être qui l’on est vraiment ; soit être vrai. Être vrai fait partie du concept de la vérité, mais si l’on peut ne peut pas être qui l’on souhaite complètement en raison d’une certaine restriction sur notre liberté imposée par la société, alors nous ne sommes point dans la vérité. Vu de l’autre angle, cela prouve encore que la vérité et la liberté se briment inévitablement l’autre à un certain moment; ils sont donc incompatibles. J’aime le point de vue de Platon face à la vérité et la liberté ; il croit que se côtoient deux mondes, soient le monde sensoriel et le monde des idées. Il est donc intéressant d’en venir à la conclusion que la liberté est celle des sensations, et que la vérité, celle des idées. Cela est tout à fait juste vu les émotions étant derrière la liberté et l’intelligence derrière la vérité.   À titre d’exemple pour appuyer mon argument, j’aurai recours à une situation de la vie courante actuelle : l’amitié est quelque chose de très précieux et important pour une grande majorité. Il va donc de soi de ne pas trahir ses amis ni de leur mentir. Cependant, dans certaines situations, il est plus respectueux de faire preuve de retenue et de ne pas dire la vérité, même si c’est contre nos valeurs de mentir. Voici un exemple concret de ce que je tente d’illustrer. Si vous remarquez sans aucun doute que votre amie a pris du poids, il serait irrespectueux et cela frôlerait la méchanceté de lui en glisser un mot sans qu’elle vous en parle d’abord. Même s’il est évident qu’elle a pris plusieurs livres et que c’est la stricte vérité, on doit faire preuve de retenue à propos de certains sujet délicats. Par le fait même, cela brime notre liberté, plus précisément notre liberté d’expression. Cet exemple appuie l’argument qu’on doit faire preuve d’une certaine retenue.

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    La science s'oppose au dogmatisme. La nature même du « credo » religieux ne peut que s'opposer à la démarche scientifique. Les credos sont la source intellectuelle du conflit entre la science et la religion, mais l'âpreté de la résistance a été due à leurs liens avec les Églises et les codes moraux. Ceux qui mettaient en doute les ...

  9. La science peut-elle faire disparaître la religion

    » La détresse infantile suscite le désir de protection, la crainte de la mort et l'expérience des souffrances de la vie sont la cause d'un désir puissant de justice et de sens. L'absence de preuves ne nuit pas à la religion, elle prend sa source dans des sentiments liés à notre condition, non dans des démonstrations ou des ...

  10. Les relations entre la science et la religion

    Ils sont de plus en plus nombreux à croire que la science est en voie de remplacer la religion du fait qu'elle réussit à répondre à de plus en plus de questions et à dissiper de plus en ...

  11. La science est-elle incompatible avec la religion

    Science et religion sont donc de façon substantielle hétérogène, ce qui les rend complémentaires. Elles ne s'affrontent pas et ne sont pas concurrentes. La science possède elle aussi des insuffisances qui peuvent être consolidées par la croyance religieuse. Il s'avère même que celles-ci semblent tout à fait indissociables.

  12. La religion et la science

    La religion et la science. Dissertation : La religion et la science. Recherche parmi 299 000+ dissertations. Par le_ptit_protege • 1 Novembre 2018 • Dissertation • 1 132 Mots (5 Pages) • 2 592 Vues. Philosophie. La science et la religion sont elles incompatibles ? Religion : croyance / textes / communauté / réservée / pas rationnelle ...

  13. La religion est-elle contraire à la raison ?

    Il est possible que la religion et la raison puissent coexister et se compléter mutuellement. La religion peut fournir un sens et une direction dans la vie, tandis que la raison peut aider à comprendre et à interpréter le monde. Comme l'a dit le philosophe Alfred North Whitehead : « La religion sera ce que la raison reconnaîtra comme ...

  14. La science et la religion sont-elles compatibles?

    Recherche parmi 299 000+ dissertations. « La science et la religion sont-elles compatibles? Préparez le plan d'intervention à l'aide de ce gabarit. Vous devez préparer votre intervention pour chacune des positions, car vous ne saurez pas à l'avance quelle position vous aurez à défendre. Imprimez le plan d'intervention complété ...

  15. Sciences et religions

    Dissertation : Sciences et religions. Recherche parmi 299 000+ dissertations. Dissertation de philo Dissertation philosophique. Partout à travers le monde, il existe différentes religions et croyances qui s'entrechoquent quotidiennement. L'une comme l'autre, pense détenir la vérité et désire transmettre aux individus qui n'y sont ...

  16. Science, philosophie, religion : quels rapports ? par Jean Bricmont

    La science ne répond pas à la question du sens. La science s'occupe de questions de fait, la religion de questions de valeur. Ce sont des « registres » différents. La religion s'occupe de questions « ultimes ». La plupart des religieux « modernes », surtout parmi les chrétiens, tiennent le même genre de discours : ils ne pensent ...

  17. La science contredit-elle la religion ?

    Tout d'abord, la science contredit la religion. En effet, la religion est un ensemble de croyance et d'actions rituelles alors que la science est prouvée par des recherches, des expériences. La croyance est différente chez chaque individu. Certains individu croit en se qu'il voit alors que d'autre croit en leur religion.

  18. Dissertation : la foi et la raison sont-elles compatibles

    A. La foi peut compléter la raison. Selon Descartes, la raison peut nous aider à comprendre les aspects matériels de l'existence, mais elle ne peut pas répondre à toutes les questions existentielles. La foi, en revanche, peut compléter la raison en apportant des réponses à des questions telles que l'origine de l'univers et le sens de la ...

  19. Dissertation : La science peut-elle faire disparaître la religion

    Le plan. Dans un premier temps, nous verrons les présupposés expliquant l'existence d'un conflit. Puis, nous aborderons les grands thèmes de la critique de la religion. Enfin, nous nous demanderons si la prétention scientifique à faire disparaître la religion ne révèle pas une méconnaissance par la science des limites de son domaine.

  20. Dissertation la foi et la raison sont-elles compatibles

    Dans cette dissertation, nous allons explorer les arguments des deux côtés de ce débat en citant les grands penseurs pour appuyer notre argumentation et déterminer si la foi et la raison sont compatibles ou non. Plan. I. Les arguments en faveur de la compatibilité entre la foi et la raison

  21. La Croyance Religieuse Est-elle Incompatible Avec La Science

    Mémoire: La Croyance Religieuse Est-elle Incompatible Avec La Science. Recherche parmi 299 000+ dissertations. Par. heivy • 24 Novembre 2014 • 1 332 Mots (6 Pages) • 2 074 Vues. Page 1 sur 6. La relation existant entre la religion et le science et un sujet, qui fait parler, depuis l'Antiquité et au sein de nombreux champs de réflexion ...

  22. « La vérité et la liberté sont-elles compatibles? »

    Je crois que la vérité et la liberté ne sont pas compatibles en raison de la retenue dont on doit faire preuve dans notre société actuelle. En effet, dans toutes les sphères de notre vie, tous se doivent d'avoir un certain filtre dans leurs actions et leurs paroles. Ceci étant dit, la vérité n'est parfois pas toujours divulguée ou ...